De la « performance » dans les arts africains
En Occident, les arts de la performance - danse, théâtre, musique - sont présentés devant une audience, sur une scène, le plus souvent à l’intérieur. Ces performances, considérées comme un « art », tendent à être formelles : audience et artistes sont distants les uns des autres, aussi bien par leur rôle que par l’espace qui les sépare. On n’attend de l’audience rien d’autre qu’une attitude passive, sauf pour applaudir, rire, ou plus rarement pousser quelques cris, qui suscitent alors de rares échanges avec le public.
On peut affirmer, malgré l’immense diversité des arts africains, qu’en Afrique « traditionelle », la vie et l’art ne font qu’un.
Les arts sont combinés entre eux et avec les autres aspects de la culture, les rites et religions. Ils ont un rôle fonctionnel. L’audience ne se distingue que difficilement des « acteurs » : elle prend une part active à la performance, ce qui donne lieu à des moments improvisées, spontanés, et se jouant dans l’immédiateté : tous extériorisent ou expriment un « feeling » dramatique.
Cette activité artistique collective ne se joue pas sur une scène mais en divers lieux, de la place publique à l’emplacement privé, réservé... le lieu du travail, le coin de rue, la place du marché etc... (on pense à l’admirable African Market Place, de Dollar Brand/Abdullah Ibrahim)
On peut parler de performance en raison de la dimension culturelle mais aussi productrice de connaissance sur cette culture : elle s’établit comme un processus en mouvement, et pas seulement comme le résultat, le produit finit d’une action : la présentation d’un spectacle. En ce sens la vie même est une performance et, en Afrique traditionnelle, tous les actes sociaux en relèvent, pas seulement la musique, la danse et le théâtre : religion, carnavals, rituels, folklore, vie quotidienne, préparation des repas, cérémonies, jeux, tradition orale, éducation des enfants, travaux, processions...
Pour juger de la validité des « africanismes » à l’oeuvre dans la diaspora noire américaine, il ne faut pas se focaliser sur les aspects quantifiables, mais sur les significations qualitatives, qui sont autant de forces culturelles actives.
Les Noirs américains n’ont pas fait que « convoyer » des éléments de culture africaine dont on percevrait ici ou là des traces : ils ont fait la preuve d’une créativité dans leurs conditions nouvelles, s’adaptant et réagissant aux événements, sur la base de leur fonctionnement culturel hérité de l’Afrique.
Portia Maultsby (musicologue) : « African retentions in African American Culture ... exist as conceptual approches - as unique ways of oloing things and making things happen - rather than as specific elements. »
(sources : Carol Lems-Dworkin. http ://members.aol.com/lemsdworkn/intro.htm)