CAHIER DÉCHARGE, 29 février - 7 juin 2012

Ouvert 29 février 2012, suite, dans anti-journal de RENTRÉE SOLAIRE, fermé 7 juin 2012. Suite dans GAZETTE AUX DÉGÂTS

23 mars

Myriam, Mohamed, Toulouse, Gaza... une insistance du son

"C'est terrible ce qu'on est en train de faire avec cette histoire de Toulouse. Au lieu de dire que Mohamed Merah est un marginal, que son acte est un acte isolé, on lui donne une idéologie qu'il n'avait pas au départ" explique Jamel Debbouze, agacé que les candidats se servent de ce fait divers tragique pour alimenter le débat de la campagne présidentielle, "une récupération terrible. "Je les connais les Mohamed Merah, il y en a plein des Mohamed Merah mais qui ne deviennent pas des Mohamed Merah. Là, on est en train de mettre dans la tête de jeunes qui ont le potentiel de Mohamed Merah de devenir des Mohamed Merah. Car, d'un coup, ce Mohamed Merah a défié le Raid tout entier.[...] "Il n'y a jamais eu d'identification, de culte de Kelkal, comme certains le redoutaient à l'époque, explique-t-il dans Le Monde. Il y a eu une charge émotionnelle sur l'instant mais pas de suite. Les jeunes sont revenus à leur principale préoccupation : trouver du travail." Pour Jamel Debbouze, "n'importe quel frustré est un malade potentiel (...) n'importe qui peut basculer." Puis le comédien conclut : "Je me demande d'ailleurs comment le monde reste aussi équilibré. Les gens devraient être encore plus fous que ça. Mais ça va, ça tient pour des raisons qui nous échappent." Fin mars 2012

Si l'on voulait "comprendre" ma poésie, je me retrouverais au coude à coude avec la représentante des affaires étrangères européenne Catherine Ashton « Toulouse c'est un peu comme Gaza », qui rejoint les justifications du "monstre" même. Mais bon, hors du produit socio-pathologique plus que "terroriste islamiste" Merah, c'est de ça qu'il s'agit, ne serait-ce qu'en tant qu'apparence, événement social-historique. Il faut encore la "folie" d'une prof de terminale pour proposer une minute de silence en mémoire de la victime Mohamed Merah. Et pourtant, n'en déplaise, c'est aussi de cela qu'il s'agit, à la folie, passionnément...

Formellement (ce qui importe en poésie, voyez-vous), Myriam, c'est le prénom d'une des enfants "juives" assassinée, comme Mohamed de son assassin, plus "fou" qu'islamisé par l'interprétation politicienne d'Etat. C'est le redoublement chez la Juive et l'Arabe de la consonne "M", Myriam, Mohamed. Ils sont MêMes. De même le "z" dans Toulouse et Gaza, avec ce redoublement de voyelles OU OU Z, A Z A... comme un hasard objectif, une rencontre de circonstances... que la poésie exploite pour souligner qu'elle n'est pas plus absurde que la rencontre, dans une rue toulousaine, d'un assassin "d'origine algérienne" et d'une enfant "de confession juive". Le formalisme poétique insiste sur la dimension humaine absurde, de ce qui n'est qu'un produit objectif de circonstances quasi organisées d'un crime dont le maître-assassin n'est pas prêt d'être puni, voire seulement soupçonné.

Il est vrai que je suis sensible aux décomptes, qui mesurent une différence de poids : combien d'enfants de quelles origines meurent ici ou là, et quel cas (médiatique, politique...) l'on en fait, entre roquettes palestiniennes et représailles israéliennes... Compter les enfants morts et leurs mères, n'est-il pas une indication des plus objectives ? En quoi Mohamed Merah n'est-il pas un monstre très rationnellement produit par ce dont il parle même ? Un monstre objectif finalement assez conscient de la situation, précisément plus qu'un "simple" terroriste islamiste, qu'il n'est pas, mais qu'on aimerait fabriquer comme tel, à des fins politiciennes, idéologiques ? 

Ce qui "nous" fait peur, c'est la monstruosité de ce monde, il lui faut, il nous faut, des victimes expiatoires. Bref, manifester un souci de comprendre est quasi inaudible. Un murmure entre murs (de Berlin à Israel une histoire de murs passe). L'hypocrisie et le cynisme recouvrant les réalités sociales règnent sur cette campagne présidentielle, y compris à l'extrême gauche, qui trouve encore des mots pour saluer les exploits policiers d'Etat. À vomir ! S'il fallait une preuve que Mélenchon et Sarkozy alimentent le même système politique du capitalisme, paradoxalement, c'est dans leur approche soi-disant opposée de cet événement qu'on la trouverait.

22 mars

Le marché aux pleurs, pour Myriam, Mohamed, pour Toulouse et Gaza...

21 mars

Raisons et déraisons de l'engagement communiste, le marxisme comme exigence morale Yvon Quiniou

Du même, 2005, Actualité de l'exigence communiste Yvon Quiniou, 2005

Livredel, c'est moi

Il y a quelques temps (je ne compte pas tout), j'ai renommé le site entier Livredel, poursuivant l'extension du roman-poème des années 1989-91, livres I à VII, d'abord à tous mes poèmes (en 2010-2011), puis à tous mes œuvrages d'art, "plastiques", jazz et autres musicaux, puis, là, à tout ce que je produis, par quoi je m'existe.

Il faudrait y ajouter la vaisselle, la bricole, le jardin suspendu à mon compostage, l'amour inconsidérable des vers de terre, etc. ce qui est, pour ainsi dire, naturellement impossible, prouvant par là-même, s'il en était besoin, que le réel dépasse le virtuel. Encore cela vaut-il pour moi, quelques générations, mais il faut envisager, par l'envahissement de plus en plus systématique de gadgets communicationnels à distance, la programmation robotisée de l'(in)humain, une transformation humaine dont on commence seulement à discerner, ici ou là, quelques effets.

19 mars

 d'une 'Communauté humaine' post-capitaliste

15 mars

Corrections-citation

«; en effet je discernais combien j'ai toujours été sujet à l'influence des idées et des réalisations de Roithamer car effectivement je m'étais entièrement abandonné au pouvoir de ces idées et réalisations de Roithamer; ce que Roithamer pensait était également ma pensée, ce qu'il réalisait, je croyais être obligé de le réaliser, j'avais été pour un temps complètement absorbé par ses idées et par toute sa pensée, j'avais dû renoncer à ma propre pensée qui pourtant, comme toute pensée, était une pensée personnelle, existant pour son propre compte et faisant bouger les esprits pour son propre compte; durant de longues périodes de ma vie et avant tout en Angleterre où vraisemblablement j'avais seulement été parce que Roithamer y était, je n'avais absolument plus été capable de penser ma propre pensée, mais seulement la pensée de Roithamer, Roithamer lui-même avait très souvent remarqué qu'il était inexplicable et donc par surcroît insupportable pour lui d'être obligé de me voir, au minimum soumis sinon livré au pouvoir de sa pensée, le suivant dans tout le cours de ses idées, qui n'appartenaient à personne d'autre que lui, peu importe où elles se dirigeaient; il avait très souvent remarqué que moi, en tant que ma pensée, j'étais toujours là où il était en tant que sa pensée et qu'il me fallait prendre garde à ne pas renoncer à moi-même car un sujet pensant comme moi, qui cesse de penser en lui-même ses propres pensées mais qui pense à l'intérieur d'une autre pensée qu'il maîtrise et admire ou également qu'il n'admire pas mais qu'il maîtrise par contrainte, un tel sujet pensant court le danger perpétuel de se tuer et de se dévitaliser par cette pratique continuelle de la pensée de l'autre. » Thomas BERNHARD, Corrections, 1975, Trad. Albert Kohn 1978, Gallimard l'Imaginaire, pp. 43-44

13 mars

Corrections, Thomas Bernhard

Présentation (Gallimard, L'imaginaire) : " Nous n'avons rien atteint que ce que tous les autres ont atteint eux aussi, en ayant réalisé et achevé l'extraordinaire, nous n'avons rien atteint que la solitude, ainsi écrit Roithamer. "

"Roithamer, Autrichien, quarante-deux ans, biologiste, professeur à Cambridge, vient de se pendre à un arbre de la forêt de Kobernauss, au centre de laquelle se trouve le Cône d'habitation, édifice parfait qu'il construisit, après des années d'étude, pour sa sœur bien-aimée, et qui devait lui apporter le bonheur suprême, mais dont elle ne put supporter la vue sans en mourir. Le narrateur, ami de Roithamer et exécuteur testamentaire, est chargé de mettre en ordre et trier les manuscrits illisibles du professeur. Une tâche ardue qui dévoile au fil du livre une figure de savant, non pas fou, mais génial, proche par certains traits de Wittgenstein, dévoré d'exigences, conduit à rejeter avec haine et dégoût la famille, les parents (la mère surtout), l'Autriche et les études, à détruire, dans le monde que nous tentons de faire, tout ce qui n'est pas perfection. Corriger, c'est là le devoir absolu, jusqu'à l'autodestruction."

Un extrait au hasard, p.139 : « À présent, dis-je, je vois que la vie de Roithamer, que son existence entière n'avait visé à rien d'autre qu'à la réalisation du Cône, tout homme porte en lui une idée qui finit par le faire mourir à petit feu, une pareille idée, qui surgit en lui et qu'il poursuit et qui, tôt ou tard, et toujours dans la plus grande tension de son être, finit par le faire mourir à petit feu, par le détruire

Avec le souvenir que j'ai de Maîtres anciens, et d'Extinction, je me suis offert un plaisir de livre, auquel j'ajoute Pour sortir du post-moderne, d'Henri Meschonnic, et Face aux ténèbres, de William Styron. J'ai une excuse. J'étais à la librairie pour attendre une femme en retard.

Appel [touité il y a 7 minutes] : Urgent cherche 500 signatures me soutenant comme non-sujet de l'élection présidentielle. Si ce n'est à mon tour, qu'il vienne, autant qu'on s'en étrenne...

Du communisme en fleur, faites fortune, écrit vain

11 mars

Le vide imparfait

Alors donc pourquoi je le garde pas pour moi, ce dont je cause ici ? C'est que je n'ai personne à l'écrire, qui soit susceptible de me comprendre et de me répondre. "La chair est triste hélas, et j'ai lu tous mes mails" soupire le héros de M-E. Nabe détournant Mallarmé dans "L'homme qui arrêta d'écrire". Des mails, j'ai fait en sorte de n'en plus recevoir, que rares et précieux, des livres, j'en ai pour plusieurs vies. Flaubert à George Sand [dont la correspondance s'établit à quelque 20.000 lettres !] rectifie l'idée qu'il placerait la littérature au dessus de tout, précisant qu'en substance il serait le dernier des "cuistres" s'il ne lui préférait pas les êtres humains. Dont acte.

10 mars

Pour un bilan humain moins lourd, que meurent plutôt les théoriciens

Jusqu'ici, les philosophes [penseurs, théoriciens...] se sont satisfait de proposer leurs idées à tout le monde. Il s'agit maintenant de reconnaître qu'ils n'ont jamais pensé que pour eux, à partir d'eux. Il ne me viendrait pas à l'idée de faire la propa de mes doutes comme valables pour d'autres que moi. Le problème n'est pas que le penseur ne doute de rien, mais qu'il fasse comme si, ce que ne verront pas les fanatiques forgeant sur ses théories leur foi de croisés dont les moyens justifie les fins d'autant qu'ils n'en ont pas. Pas seulement un outil pour la pratique, une arme pour les armes d'un absolutisme totalement subjectif au nom de l'objectivité. Pas seulement lutte de classes, la pauvre..., théorie pour la guerre civile généralisée dans le chaos, avec ses bons et ses méchants, ses indiens et ses cow-boys. Avec des fusils, il n'y a jamais que deux camps, aux frontières plus que relatives. À preuve, quelques dizaines de communisateurs n'ont pas encore de fusils mais déjà leurs ennemis de l'intérieur.

Le bilan de la Commune de Paris est difficile à établir. Du côté des combats, c'est de l'ordre de 4.000 insurgés tués pour 900 Versaillais (moins qu'en Syrie cette année). Du côté des morts de décision froide, sans parler de 10.000 déportés, de l'ordre de 20.000 communards, pour 80 otages qu'ils avaient fusillés. Avant de s'y rallier de loin, Marx était plutôt opposé à la lutte armée des ouvriers parisiens. Côté éthique, une émeute, une insurrection, une révolution, soit on y va, soit on ferme sa gueule. Pour la théorie, itou, soit on la fait pour soi, soit on assume la responsabilité des monstres qu'elle produit, sans aller se prétendre incompris, puisqu'on sait qu'elle ne vit que d'être incomprise, "ben mal capito". C'est bizarre comme les monstres qu'elle produit ne sont jamais théorisés comme ses produits. Marx, Lénine, Staline, Mao sont morts dans leur lit... Ils aimaient tellement leurs enfants. 

La classe, le concept, a ceci de pratique qu'elle n'a pas l'air d'être faite de chair et de sang, et certes, ce n'est pas une collection d'individus prolétaires, une sociologie. Elle peut anéantir la classe adverse et s'auto-abolir sans taches sur le papier des promoteurs de guerre sociale. La théorie a toujours les mains propres, elle ne compte pas ses morts ni passés ni présents, elle corrige ses erreurs scientifiquement pour les morts de l'avenir. Braves théoriciens du bonheur de l'humanité.

« Si nous choisissons la carrière dans laquelle nous pouvons faire le plus de bien à l'humanité, les lourdes tâches ne pourront nous accabler, car elles ne seront qu'un sacrifice au bénéfice de tous... L'expérience place au sommet du bonheur celui qui rend heureux le plus grand nombre, et la religion elle-même nous enseigne cet idéal que tous s'efforcent d'atteindre : se sacrifier pour l'humanité. Qui oserait lui opposer un démenti ? Si donc nous avons choisi la situation où nous pouvons faire pour Lui le maximum, nous ne pourrons jamais plus être écrasés par le fardeau, puisque ce dernier ne sera pas autre chose que les sacrifices consentis pour l'amour de tous. » Karl MARX, Considérations d'un jeune homme sur le choix d'une carrière, vers 1830 (Marx, né en 1818, est alors lycéen)

Dès que le communisme se donne comme but la révolution comme dépassement de la lutte de classe, il dévoile son humanisme théorique. De Marx à Althusser, ce qui commence par un renversement de la religion s'achève en foi révolutionnaire - ils sont toujours fidèles à leur prime jeunesse (Marx protestant, Althusser catholique, Staline séminariste anti-sémite... tous des curés dans l'âme). Il n'y a pas là-dedans plus de matérialisme que dans la religion. La faute n'est pas de croire en cette perspective de la lutte. Intellectuellement, c'est de fabriquer par la théorie une idéologie, de nier qu'il s'agisse, fondé sur une seule hypothèse, d'un pari. Accessoirement, c'est de croire qu'on se bat, quand c'est avec les couilles et la peau des autres.

« Ouvrier : Toujours honnête, quand il ne fait pas d'émeutes.» FLAUBERT, Dictionnaire de idées reçues

« De toute la politique, il n'y a rien  qu'une chose que je comprenne, c'est l'émeute. Fataliste comme un Turc, je crois que tout ce que nous pouvons faire pour le progrès de l'humanité ou rien, c'est la même chose.» FLAUBERT, à Louise Colet, 6/7 août 1846

« Ah ! que je suis las de l’ignoble ouvrier, de l’inepte bourgeois, du stupide paysan et de l’odieux ecclésiastique ! C’est pourquoi je me perds tant que je peux dans l’Antiquité ». FLAUBERT, Lettre à George Sand, 6 septembre 1871

D'autres se perdent dans la théorie annonçant l'avenir.

« Quand nous trouvons le monde trop mauvais, il faut se réfugier dans un autre. Le vieux mot « la consolation par les lettres » n'est pas un poncif !» FLAUBERT, à la princesse Mathilde, 11 juin 1871, Correspondance IV, Pléiade p.318

Id. Consolation par la théorie, la poésie, l'art...

« Je vais tâcher de me remettre à mon Saint-Antoine, afin d'oublier mes contemporains. Quant à publier ce livre, dont le sous-titre pourait être « le comble de l'insanité », je n'y songe nullement, Dieu merci... Il faut, plus que jamais, songer à faire de l'Art pour soi seul. Fermons notre porte et ne voyons personne. » FLAUBERT, à Marie Régnier, 11 juin 1871, Correspondance IV, Pléiade pp.330-331

« Tout misanthrope, si sincère soit-il, rappelle par moments ce vieux poète cloué au lit et complètement oublié qui, furieux contre ses contemporains, avait décrété qu'il ne voulait plus en recevoir aucun. Sa femme, par charité, allait sonner de temps en temps à la porte.» CIORAN, De l'inconvénient d'être né

Il est préférable de rendre les autres furieux contre soi, de supprimer la charité de la femme, ou à défaut la sonnette de la porte.

Marie-France Garo, Marx et l'invention historique, Syllepse 2012, Avant-propos et sommaire

9 mars

Exclusif [il y a 3 minutes]

Patlotch : « Je serai présent à mon tour ! ». Pressé par personne de préciser sa pensée, le non-candidat bayonné de toutes parts aurait, selon un proche, ajouté par devers lui : « C'est au prés[id]ent que nous parlons de communication »

8 mars

À des femmes de ma vie

Ma grand'mère maternelle et mon premier amour sont nées un 8 mars. Je me souviens d'elles en écoutant ces deux nocturnes op.55 de Chopin, dans la version pour moi la plus profonde que je connaisse, de la mère de famille Maria-João Pires (Deutsche Grammophon 1996, 2 CD à petit prix).

Pour un capitalisme vert réellement réel : NiKtaMer

J'ai appris il y a quelques temps qu'existait une loi, ou réglementation européenne, interdisant de réutiliser d'une année à l'autre les graines produites par une plante achetée à telle compagnie, propriétaire intellectuelle, comme de telle musique reproduite sans payer. Un Adopic vert. À défaut, une amende... 

Je suggère, entre autres idées sans fin car le capital aura toujours plus d'imagination que moi, de doter chaque citoyen-ne d'un bracelet électronique comptant ses pas, et de les facturer au prix de l'usure de notre bien commun préssieu, la terre - s'entend en versions béton, bitume, trottoirs, plage en bord de Seine, plancher de verre et tous lieux publics, etc.*

* J'en cause, obligation de réserve oblige, sous couvert de mon ex-patronne ministre de l'environnement et porte-parole de noster président-candidat. J'ai nommé, en cette journéd'lafemme, la poufiasse au sigle de chanteuse rap de la haute, NKM (NiKtaMer ?).

7 mars

De la frime

« Je dis à mes disciples ; n'oubliez jamais que je ne suis pas un de vos braves professeurs, mis au point garantis. Avec moi on ne sait jamais. À chaque instant je peux dire une bêtise ou mentir, de façon générale vous mettre en boîte. Avec moi il n'y a aucune assurance. Je suis un fripon, j'aime m'amuser - et je m'en fiche, je m'en contrefiche, je m'en fiche... de vous et de mon enseignement. » Witold GOMBROWITZ, Journal, 1959, Gallimard, Folio, pp 11-12

D'un côté ce genre me fascine, me fait envie - j'aimerais bien m'en fiche -, d'un autre il me débecte. Bêtises, sans problème. Mentir... hmm, difficile, vraiment difficile. Disciples, enseignement... nonobstant l'ironie, beurk. J'aime m'amuser, mais c'est justement parce que je m'en fiche pas qu'avec moi, il n'y a aucune assurance.

5 mars

Visites du site

Je n'ai plus accès aux free statistiques offertes librement. Adoncque n'en sais-je quoi ni qu'est-ce, ni qui voit quoi ni le décompte. Je m'en porte que mieux et je dirais même plus, allez savoir combien.

PS : je plains ceux qui ne comptent que sur leurs divisions

3 mars

Les présents de l'artiste

« Et pourtant le présent implique assurément une succession fluide de passés, le développement d'une entité dont notre présent actuel n'est qu'une phase.» James JOYCE, Portrait de l'artiste, 1904

« Ceci dès maintenant apparaît limpide et clair : ni les choses futures ni les choses passées ne sont, et c'est improprement qu'on dit : il y a trois temps, le passé, le présent, le futur. Mais peut-être pourrait-on dire au sens propre : il y a trois temps, le présent du passé, le présent du présent, le présent du futur. Il y a en effet dans l'âme, d'une certaine façon, ces trois modes du temps, et je ne les vois pas ailleurs : le présent du passé, c'est la mémoire; le présent du présent c'est la vision; le présent du futur c'est l'attente.» Saint-Augustin, Confessions, XI, 20, cité en note suite à la phrase de Joyce ci-dessus, Gallimard Folio 1992, p.376 (cf une remarque analogue d'Henri Meschonnic, dans Modernité Modernité).

Des nouvelles de Grèce : "tout devient dans la lutte et la nécessité"

« Le contraire est accord, des discordances naît la plus belle harmonie dans la lutte » Héraclite, Diels 8

« Les unions (sont) entières et non-entières, concorde et discorde, accord et désaccord; et de la Totalité (naît) l'Unité et de l'Un le Tout » Id, 10

« Ils ne comprennent pas comment le discordant s'accorde avec lui-même; harmonie des tensions opposées, comme celle de l'arc et de la lyre » Id, 51

« Le Temps est un enfant qui joue, en déplaçant des pions » Id.52

« Il faut savoir que la guerre est commune, la justice une lutte et que tout devient dans la lutte et la nécessité » Id.80

2 mars

L’organisation scientifique du travail : aliénation, annihilation, suicides. Mode d’emploi de la secte managériale, Échanges 134, 2010

1er mars

L'abolition de la valeur (feuilleton)

De chacun selon ses capacités, à chacun son feuilleton... Bruno Astarian poursuit son questionnement sur la perspective communisatrice de sortie du capitalisme, en abordant la question clef de l'abolition de la valeur, telle qu'elle ne se présente pas encore chez Marx, en définissant le communisme de toute autre manière... avec plus de questions que de réponses. Heureux qui communiste abolit le péage...

Car définir le communisme, entre le mouvement abolissant l'état présent des choses et l'état des choses après abolition, cela suppose en tout état de cause de reconnaître que le mot même, le concept, a changé de sens, qu'il n'y aura communisme - et communistes (ou révolutionnaires si l'on préfère) - qu'à partir du moment où l'abolition s'engagera, et ne pas faire comme si c'était le cas dès maintenant. En attendant, des blabla et du sang au pied du mur de l'argent, qu'il ne suffira pas de faire tomber. Car tant que le pas n'est pas franchi, le communisme n'existe ni comme état ni même comme mouvement abolissant l'état présent. Il relève d'une projection théorique, d'un rêve de communisation, d'un pari pascalien contre la probabilité de chaos, de pourrissement social globalisé... C'est pourquoi à mon sens on ne peut parler de "théorie communiste" qu'en terme d'engagement dans cette perspective, ce qui interroge la pertinence du terme "théorie" autant que celle du mot "communisme", car chaque terme transforme réciproquement le sens commun de l'autre. Et jusque-là cet engagement doit reconnaître sa nature première comme éthique ou morale, comme on voudra - chez Marx comme chez les communisamateurs - même si elle se fonde sur la réalité matérielle de l'exploitation. C'est comme ça que s'explique le comportement idéologique, militant, religieux, de gens de partis et d'églises, des militants "communistes" de collectifs quels qu'ils soient.

Sans attendre la suite, dire que toute projection au-delà du visible laisse songeur quant aux siècles de luttes sans classes qui attendent les "communistes" pour auto-abolir le droit post-prolétarien de leur non-Etat et l'inévitable police communisatrice pour (non-)travailleurs malheureux de s'activer entre eux immédiatement. L'homme sans genre n'est pas près de vivre sans soucis. Un homme de grande valeur. Un homme nouveau. Mais tous les espoirs ne sont-ils pas permis, quand on apprend que « l'ayatollah Khomeiny, dont on sait quel traitement il a réservé aux Iraniennes, faisait la vaisselle et récurait les toilettes de sa maison pour que son épouse n'ait pas à le faire ! » (source Ces femmes dans l'ombre des dictateurs)

Le (non-)sujet agite le (non-)intermonde grec : le monde va se faire voir chez les Grecs

Blaumachen analyse les événements du dimanche 12 février en Grèce, « un de ces moments historiques où les contradictions d’une société capitaliste se rencontrent dans le temps et l’espace et se déchaînent de façon explosive, conduisant à la production d’une nouvelle réalité.»

Le plus intéressant est comment ici l'activité d'émeutes, autrement dit la forme de la lutte de classe du point de vue prolétarien, participe de la crise de l'économie politique - s'intègre à la "crise grecque". Il n'y aurait pas crise du capital s'il n'y avait pas lutte de classe, limite à l'exploitation comme moteur de la valorisation du capital. Il suffirait aux prolétaires de se laisser condamner sans fin. Jusqu'où ?

maj 3 mars  Le plus étonnant est l'optimisme qui fait commencer un paragraphe par « En considérant les pratiques de dimanche (les pratiques d’émeute), on se rend compte que ces fractions particulières du prolétariat...» et quelques lignes plus loin « Afin que la vie continue au sein de la lutte, les pratiques vont se transformer, contraintes de remettre en question l’existence des moyens de production en tant que moyens de production de valeur La Grèce est certes un événement mondial, mais le monde n'est plus un événement grec. Le bonheur est au bout de la contrainte, mais les marathoniens* communisamateurs commutés amuseurs ne manquent pas de souffle. Le monde va-t-il se faire voir chez les Grecs ?

* Marathon : « Le nom vient d’une histoire assez intéressante : Phidippidès, un messager grec aurait couru de Marathon à Athènes pour annoncer la victoire contre les Perses à l’issue de la bataille de Marathon lors de la première guerre Médique en -490. Arrivé à bout de souffle sur l’Aréopage, il y serait mort après avoir délivré son message.» Wiki

29 février

Isidore Maboul, feuilleton en 42 épisodes

J'ai mis un point final à ce brouillon. C'est imprimable en 13 pages 21-29,7. Je n'ai pas le temps pour l'heure de faire mieux.

Agiter avant de lire

Littérature, poésie... Ce qui m'intéresse c'est davantage comprendre comment c'est fabriqué que ce que ça raconte. Ceci sans outils d'analyse structuralistes ou autres. Au plus près de l'unité de la forme et du sens. M'y ont encouragé toutes les conneries des savants à propos de Céline ou Heidegger, par exemple, dévoilées par Meschonnic au sein du langage comme rythme et oralité (oralité de Céline mon cul ! C'est un artifice qui ne trompe que ceux qui n'en sont pas, du "peuple"). J'écris des poèmes en dévoilant toujours quelque source. Ça paraît pédant. C'est noyer le poisson qui l'est, comme élitisme revendiqué d'avance, égocentrisme à gerber. Debord et ses détournements, tout un artifice, ce qu'il n'est pas chez Marx ou Lautréamont, à une époque où ceux qui les lisaient savaient lire, avaient des "humanités". Quand on voit que pour comprendre le prétendu révolutionnaire Debord, il faut qu'un besogneux d'université passe derrière deux décennies plus tard pour décrypter tous ses "détournements", c'est proprement honteux, puisque le propre du détournement situ, c'est de n'avoir de sens qu'en référence à ce qu'il détourne comme étant connu, compris, d'où se dégage une autre compréhension, critique de la première. Tel est pris... Ce n'est que vanité, dont les suiveurs et exégètes tireront la leur, en singeant son style jusqu'à la farce. Qu'on nous dispense d'avoir le goût de ce genre de rebellion et de marginalité (id naturellement pour la cohorte des post-situs et autres nuisances pour bobos littéreux). Un jeu de cons qui jamais ne libèrera personne de l'aliénation d'appartenir à la caste de ceux qui savent lire pour lire, contre ceux qui ne savent pas lire, et n'en ont pas besoin pour agir.

Borges et " la word music " de Bernard Shaw

« Et puisque nous sommes seuls, je peux vous dire que je crois n'avoir lu aucun livre de la première à la dernière page, sauf certains romans, et aussi l'Histoire de la philosophie occidentale de Bertrand Russel. J'ai aimé feuilleter; ce qui signifie que j'ai toujours eu l'idée que j'étais un lecteur hédoniste, qui n'a jamais lu par devoir.» Jorge Luis BORGES, Ultimes dialogues avec Osvaldo Ferrari, 1987, zoé/l'aube, p.13 

« OF : Vous avez dit que toute poésie qui se base sur la vérité ne peut être que bonne...
J.L.B : Et... il faudrait ajouter « qui se base sur la vérité ou l'imagination absolue », non ? ce qui est le contraire; enfin, pourvu que l'imagination soit vraie elle aussi, au sens où le poète doit croire ce qu'il imagine. Penser à la poésie comme à un simple jeu de mots me semble catastrophique, même si le rythme est maintenu. Cela me semble une erreur, non ?
» Id p.32

« OF : Vous avez dit que le mot musique, appliqué au vers, est une erreur ou une métaphore; qu'il existe une intonation propre au langage.
J.L.B : Oui, par exemple je crois avoir de l'oreille pour ce que Bernard Shaw appelait la
word music (la musique des mots) et je n'ai aucune oreille, ou fort peu, pour la musique instrumentale ou chantée.» id. p.33

Ce qui est incroyable, c'est comment les "grands écrivains" à partir du moment où ils n'ont, étant reconnus comme tels, plus rien à prouver, peuvent affirmer, asséner sans contradicteur qu'un faire-valoir, des "vérités" somme toute discutables. Voir ici les critères de la "bonne" poésie, qui élimineraient pour sûr un bonne part d'Apollinaire, Hugo, Verlaine, Rimbaud... Ce qu'il dit sur la musique et la poésie, je le partage, et c'est comme ça que je comprends Mallarmé aussi.

Pour ce qui est de Bertrand Russel, j'ai longtemps fait la confusion avec Raymond Roussel, mais depuis que j'ai compris comment il avait écrit certains de ses livres, franchement, je trouve ça très fumeux dans le genre pré-oulipien, quel que soit le "merveilleux" du résultat, et je conçois qu'il n'ait pas été plus reconnu que ça avant qu'on s'en occupe... pour le récupérer (les surréalistes). Faut vraiment qu'il existe des gens pour qui n'existe que ça : la littérature... Un quasi non-sens, quand on y pense, et pourtant... Au niveau fabrication, je préfère ma façon du son et du sens, qui est tout sauf de l'aléas ou des mathématiques. D'oussque je feuilleterais de préférence le philosophe anar-matheux Russel B que le pré-surréaliste fumeux Roussel R.

À par ça, tout ce que Borges raconte, nonobstant son rejet de l'État, des États, sur l'identité sud-américaine à construire, c'est franchement pas un horizon bandant for me, diable. Ça sent tellement le vieux costume national, à peu près comme Pessoa fantasmant, puis réalisant, d'être le grand écrivain portugais... Les grands écrivains, parfois, se distinguent surtout par la petitesse de leur ambition - être connu, être connu comme meilleur que, comme meilleur de, représentant de, influençant son époque... -, dans laquelle se reconnaissent les petits admirateurs qu'ils méritent, en tant que grantommes. Si je me demande pourquoi je les admire, moi, je trouve que c'est en lisant leur œuvre, pas leurs commentaires off. Tout en reconnaissant que s'ils n'étaient pas devenus "grands", je n'aurais pas eu cette chance. Bof, c'est compliqué, n'est-ce pas ?

Rompre

D'avoir souvent rompu, j'aurai beaucoup écrit sur la rupture, mais le moins que je puisse dire c'est que je n'ai pas acquis l'art de rompre avec grâce. La vraie difficulté, c'est de rompre avec soi, de le comprendre ainsi même quand on croit rompre avec les autres. Certes les autres peuvent rester attachés à ce que l'on est pour eux, mais ce n'est pas une raison pour leur reprocher de rester eux-mêmes, quand on rompt avec soi, car même si ça donne l'impression d'être avec d'autres, ce n'en est que la conséquence. Ils n'en sont pas responsables. Partager des idées ce n'est pas entretenir une conversation détachée, mondaine ou de bistrot - il y en a qui adorent ça, parce peu exigeants, ou confondent plaisir du bistrot et intérêt de la conversation. Plus besoin du bistrot que d'un dialogue fécond ? Tourner en rond des décennies de sa vie, si ce n'est dans les mêmes bistrots, les arrange que ce soit des mêmes conversations : rupture du même ou mêmes de non-rupture ?

C'est pourquoi je n'ai plus rien à dire à ces autres quand je suis en désaccord sur quelque chose d'essentiel et profond. C'est réellement un "je est un autre" qu'ils ne sauraient reconnaître, fonctionnant selon un principe de continuité sans rupture avec eux-mêmes, et prisonniers affectifs de leurs potes en coteries.

Les seul-e-s ami-e-s que je garde ne le sont pas sur la base d'idées partagées, et cette amitié-là, effectivement affective, est en principe protégée de tout changement de mes idées, et des leurs puisqu'eux ont la chance de ne pas vivre selon des idées, un combat d'idées.

La solitude dont je parle aujourd'hui comme nécessaire n'est qu'une traversée intellectuelle du désert pour passer à autre chose en ce qui me concerne, sans les entendre remuer mes casseroles à chacun de mes pas. C'est une solitude dont je sortirai en retrouvant la sérénité, autrement dit la bonne angoisse, nécessaire à la création.

La seule question qui s'est toujours posée à moi, de façon vitale, c'est de faire quelque chose où je ne m'ennuie pas, c'est-à-dire quelque chose de moi-même, et non d'une nécessité extérieure. Quelque chose dont je ne fais pas rapidement le petit tour, et puis s'en vont... Je dois reconnaître ne pas être de la masse de ceux dont la vie individuelle dépend, selon Marx, de l'appartenance de classe. Je suis un privilégié de la désappartenance de classe, parce que ne m'intéresse qu'à ce que je produis en dehors de la nécessité de travailler pour vivre, parce que cette production ne dépend strictement que de moi, et se satisfait de modestes conditions matérielles. Il m'intéresse mille fois plus de créer par moi-même une merde plutôt que consommer le supposé génie des autres s'il ne nourrit pas ma merde à moi. Me suffit généralement ce qu'on se procure quasi gratis dans les bibliothèques municipales, et quelques recherches sur Internet. À quelque chose l'esprit public républicain fut bon. C'est pas une raison pour songer que le défendre ouvrirait un avenir. Quant au temps, plus on va vite plus on le perd en riens, alors faut pas raconter des histoires. Casser les écrans, pour commencer à vivre.

Un regard d'enfant ?

Dans le RER à deux étages, depuis celui du bas, le regard est assis à hauteur des jambes passant sur le quai. Cela permet, entre autres, de voir comme un petit enfant le monde des grands.

Qu'est-ce qu'un jour anniversaire ?

Chaque année, 365 ou 6 fois, c'est l'anniversaire d'un jour où il s'est passé quelque chose dans la vie de quelqu'un. Pour une simple naissance, à considérer seulement les vivants, environ 7 milliards, cela fait en moyenne 20 millions d'anniversaires à souhaiter chaque jour. C'est sans compter les morts, et toutes sortes d'événements considérés comme importants par certains, par exemple la naissance du Christ, l'envolée de sa mère, la prise de la Bastille, l'effondrement des Twin Towers, l'arrivée du printemps...

Le 29 février a ceci de singulier qu'il n'arrive que tous les quatre ans, ce qui limite les dégâts, mais n'a pas empêché le tremblement de terre d'Agadir, en 1960. On honore quatre fois moins les 15.000 disparus ce jour-là que ceux de catastrophes arrivées un jour "normal". Mais ne sont-elles pas trois fois plus tristes encore, ces années privées de "commémoration" ?

Il m'est arrivé cette chose troublante, un jour d'anniversaire, d'hésiter sur mon âge. À un an près, je ne savais plus, vraiment, j'étais perdu dans le chiffrage. Ce trouble n'avait rien de désagréable. Au contraire, je sentais ma vie comme en apesanteur dans le temps. Cela avait quelque chose de libérant, non que je me sois senti plus jeune, ou dispensé de vieillissement, mais le décompte n'avait plus d'importance.

Je pense aujourd'hui à quelqu'un dont je me serai ici trompé de date anniversaire, un ratage des plus symptomatiquement douloureux.

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