Art et politique
Les polémiques entre avant-gardes artistiques et avant-garde politique, qui se concentrent sur les questions du réalisme, de l’autonomie de l’art, de sa potentialité émancipatrice... traversent tous les affrontements esthétiques au cours du XXème siècle (futurisme, expressionnisme, surréalisme, années 50-60, Cobra, Lettrisme, Situationnisme...).
Elles sont encore d’actualité, puisque c’est sur la base de leur caducité supposée que s’établit l’idéologie de la post-modernité, brassant « fin de l’histoire », « désenchantement » et autre « mort de l’utopie ».
Ce rapport a été développé, concernant le jazz, en 1-2.2 (Jazz et politique) : c’est celui de l’art et du Peuple, très présent dans les préoccupations de Bela Bartok, dans les oppositions entre Kurt Weill et Bertold Brecht ou Hans Eisler (art d’élite / art de masse), qui se retrouvent dans le théâtre des années 50, par exemple autour de Jean Vilar.
Ces confrontations entre artistes ont leur pendant chez les idéologues et théoriciens marxistes (De Marx, qui ne pense pas l’art, à Plékhanov qui en fait une lecture rigide, la « théorie du reflet » chez Lénine et Lounacharski, les réserves de Trosky, Georg Lukacs et Ernst Bloch, Walter Benjamin, Theodor Adorno et l’Ecole de Francfort... Henri Lefebvre, Marcuse...).
Les groupes artistiques de l’après-guerre et des années soixantesont aussi très préoccupés par ces questions (Lettristes, Nouveaux Réalistes, Cobra, etc.)
Guy Debord et ses compagnons situationnistes auront, eux un positionnement original, car ils liront Marx et le jeune Lukacs avec des yeux d’artistes, avant de réinvestir progressivement la théorie politique.
De fil en aiguille, on se retrouve, avec ces derniers, voyageant dans les queues de comètes surréalistes, à la veille de l’explosion de mai 68, dont ils seront une des sources. Avec des lendemains, qui, avant de déchanter (et déjanter), glisseront sous la plage leurs pavés. Prometteurs selon nous, et que certains déterrent aujourd’hui.