PRINCIPES DE RÉALITÉ, septembre 2007 à septembre 2008

« Quant à l'antinomie de l'art et de l'amour, elle n'est sans doute qu'un cas particulier d'une antinomie universelle. Si on veut faire les choses profondément, on ne peut à la fois - par exemple, en ce qui me concerne - créer, se cultiver, chasser l'aventure, chasser la gloire, et aimer : il y a toujours une de ces activités qui est trahie. » H. de Montherlant, Les lépreuses

« SURRÉALISTE ! »


On n'a jamais vu
Autant de poètes
Qu'au temps d'internet

Aucune bévue
Personne ne pète
Plus beau que son culte

Tant de vers si chauds
Que le vernis sot
Rime au froid soleil
Avec doigt dans l'oeil

Reality show
Prime time and so
Poème à l'orteil
Taylor alors paye


FoSoBo, 22 septembre 2008, 21h13

> Sonnets

*

DE LA MISÈRE EN MILIEU MOYEN
Mal armé de ses faux désirs,
Au hasard on jette ses dés
Sous les roues d'un train de loisirs
Qui vite déraille vidé

De marchandises sans plaisir,
Pour celui de ne pas s'aider
Au coût d'un effort pour saisir
La règle d'un jeu bien fondée...
 
Roule triste jeunesse,
Mise sur ta détresse,
En paris dérisoires,
 
Un espoir illusoire
Au si clair résultat :
Ta misère en l'état
FoSoBo, 25 juin 23h20
 
 
*

ON SE MÉNAGE ADROIT

On a si mal, on est si seul, sans témoins, quel tracas !
On traîne avec les siens en se disant qu'on n'en est pas,
On arbore sa solitude au milieu des confrères.
Ce qu'on a clamé haut, on en fera, bah... le contraire.

On se sent différent
En gardant ses repères,
Mieux d'être dissident
Au milieu des pépères

Qui me ressemble ? Ah la la !
En voilà un, on suit ses pas...
On vibre, on adore, c'est la nuit !
Quelle aventure ! Et sans ennuis !

On risque tout sans risquer rien,
On fréquente les lieux pour des surprises sur mesure
De l'exigent standing digne de sa littérature,
On s'apparie sûr à Paris hein !?

On calcule, poussé dans les reins,
Pour conserver tout son crédit
À la consommation sans freins
De plaisirs citoyens inédits

Mais en bon droit autorisés,
Assurant leurs frissons culturel
Hédonistes labellisés
En savoir-vivre de manuels

On a le goût de l'amoral
Tirée des romans pour praxis.
On rentre tôt dans la normale,
On arrivera vite. En taxi.

Ailleurs, 29 mai, 15h37

*

À LA RAMASSE

« La franchise et la vérité sont rarement bonnes auprès des femmes » Prosper MÉRIMÉE

On a peur de sa vérité
Autant que de ceux qui la disent
Et jugeant d'immédiaté,
On la fuit, sans garde à la crise.

On ne se pose de questions
Qu'en supposant la solution
Présentant la facilité
D'être gérable à moins coûter.

On croit investir l'avenir
Tout en préparant sa ramasse
Dans un mirage à investir.

Demain est là. On en est las.
Sous ses jolis habits d'hier,
On préfère encor ses oeillères.

Ailleurs, 29 mai 2008, 13h03

> SANS RÉPIS PLUS DE CENT SONNET, 197?-2008

*

À CHAQUE JOUR SUFFIT SA PEINE

(de l'âme à son poète)

À chaque jour suffit sa peine
De celle que tu fais à celle qu'on te fait
Où crois-tu que cela nous mène ?
Demain le chante, aucun câlin ne rend parfait.

Il est temps que tu te reprennes,
Ta vie va s'arrêter, noire au fond d'un café.
Tourne tourne ton coeur à la traîne,
En valse lente, accords mineurs, génial effet !

Le temps nous ronge de misères...
Béats bas de saoulantes prières...
Chacun poursuit son ombre inspirée des nuages, bof !

Et chaque vie subit sa haine,
De promesses vaincues en faiblesses vécues,
Seules pour seuls. Tomber debout c'est pas de bol !

Ailleurs, 26 mai, 16h00-23h56

*

LA PEUR ET LA FLEUR

«... une fleur est la chose la plus politique qui soit, parce qu’en la considérant, vous comprenez qu’elle fait partie des révolutionnaires de ce monde.» William Parker, contrebassiste, 1997

Voici l'effroi.
Mais n'est-ce
que du show
business ?

Nul paysan dans les Passages. Nul poète n'y part plus en voyage. Les rues racontent la défaite entérinée de la cité. Plus de psycho-géographie à inventer. Plus d’art à renverser.

Un groupe de saltimbanques s'installe à l'angle des boutiques. Je leur demande mon chemin. Affairés à leurs costumes de scène, ils se moquent de moi. Ils affichent une fière survie dans le pouvoir de leur spectacle. Pourquoi leur donner tort ? Il n'est pas encore l'heure. Pourquoi nier le bonheur d’un vrai moment du faux ? Éloge de la fuite... pourquoi pas ? Je passe mon chemin.

Au bout du conte, j’arrive nulle part. Sans hasard objectif. Sans surprise. Sans ailleurs. Le cours du global'monde est partout quotidien. De la capitale, la cartographie est de retour au capital.

Pourtant mon coeur est chaud.
Alors de quoi la peur ?
Et d'où vient cet effroi ?

Mon téléphone est sans appel. Portable à la décharge. Allons-y. J’y vais. Victoire du nettoyage durable, rien n’est plus propre qu’une déchetterie. Sur une poubelle citoyenne, mon regard est attiré par un point de couleur. On y a déposé une rose ancienne, fraîche comme une jeune fille en fleur. Alors pourquoi la peur ?

FoSoBo, 5 mars 2008, 17h35

*

VIDANGE

Un déluge de larmes emporte les démons.

Purgé de son sang noir, le coeur
repart aux rythmes de la vie.

La mort a perdu la partie.

La guerre intérieure est finie.

FoSoBo, 15 février 2008, 2h14

*

TERME ET CHUTE

Chanson (choro en valse lente)

Dans la chambre accouchée d'elle une femme enfante
Comme un poison dans l'eau de son lit sous la mer
Ses yeux ne sont pas bleus mais dans le noir ouverts
Et son coeur alangui rêve une forme absente

Dans la chambre à côté un homme en choro lent
Valse en rond dans sa vie, ni aigri ni amer
Mais dans son âme il pleut les larmes à l'envers
D'un corps qu'il a noyé en brassant sous le vent

Il n'y a rien à dire il fait froid c'est l'hiver
Et son mal à guérir quand le printemps revient
Draps dessus sans dessous il ferait beau demain

La défaite est acquise et tout est à refaire
La mort du prolétaire et l'amour sur la terre
L'éternité c'est elle et lui tels mais sans mains

FoSoBo, 24 janvier 2008, 8h53/28 janvier, 19h33

> SANS SONNET PAS DE RÉPIS, 197?-2007

*

DÉ A l'AMER

Un dé jeté jamais
au vague à l'âme
n'abolira le doute
amer de l'impossible
pour le prix à payer du réel

FoSoBo, 13 janvier, 22h57

*

LIEU DIT

C'est un lieu de chair et de silence

Où l'absolu s'apaise d'être à nu
Traversant les miroirs des non-lieux
Pour inventer la forme d'un nous-dieu
En ses vérités reconnues

C'est le lieu cher de son absence

FoSoBo, 2 janvier 2008, 13h48

*

MISÈRE DU TEMPS SOCIAL
 
C'est l'ami du travail,
l'ennemi de nos pas,
qu'il compte où que l'on aille,
de naissance à trépas
 
Mort à ce temps social !
à ses cadrans pour crans,
pseudos du capital,
à sa cadence en rangs
 
Alignés réguliers,
égrenés singuliers,
et sans fête commune
Que le viol de ses règles
en volant dans le vent
qu'elle souffle devant
 
        FoSoBo, 17 octobre 2007, 21h22
*
A QUATRE PIEDS
 
        (Misère de la raison, 3)
 
Ce coeur en cage
un pygmée lion
quel fouet l'enrage ?
c'est la raison
 
De ses mirages
où nous plions
à ses images
sans horizon.
 
Ce corps bourreau
même pas drôle
tient les barreaux
d'un si bas rôle. 
 
Gala ou fête ?
je sors demain
la vie est faite
à quatre mains.
 
        RER B, 17 septembre 2007, 10h06

*

LES MOTS POUR LE DIRE

(Misère de la raison, 2)

« Plus tourmentée encore que nous par cet éternel besoin d'amour qui ronge notre coeur solitaire, la femme est le grand mensonge du Rêve » Guy de MAUPASSANT

Aux vrais amis 

La femme est le présent de l'homme
en ses maux retournant les cartes
du monde échu tel une pomme
de Newton sous le vœu de Descartes

Des mots la femme nous écarte,
du désespoir de rester comme
défilant vains sous des pancartes.

L'Homme n'existe pas il n'est
jamais que le rêve de rien
la vanne essence où la foi naît

De renaître une fois pour toutes
emphase de la société
au passé d'une humanité
promise au futur en déroute

FoSoBo, 16 septembre 2007, 10h51

Note : dans ce poème, dont le titre reprend celui du best seller de Marie Cardinal, je règle mes comptes avec le rationnalisme, l'humanisme théorique, l'idéalisme et son romantisme, le féminisme orthodoxe et le subjectivisme militant, renvoyant à Aragon (« La femme est l'avenir de l'homme ») et Lacan (« LA femme n'existe pas »). 

> SANS SONNET PAS DE RÉPIS, 197?-2007

*

MISÈRE DE LA RAISON (1)
A Max ROACH
(Valse lente, contre toutes Lumières)
La raison sonne l'arrêt des songes
arraisonne les sens et les ronge
La tête s'abandonne au cafard
d'un désir qu'il broie en cauchemar
 
L'autophage assaisonne et puis mange
ce que fou l'amour change et dérange
en jetant son pavé dans la mare
où le sang se retourne et l'égare
 
Comme les choses et non les mots,
corps jamais qui ne seront plus beaux
qu'à nos yeux fuyant les faux regards
 
De ce monde ignorant ce qu'il est
pour croire que serait aussi laid
où nous porte quand l'ardeur envole
 
    RER B, 10 septembre 2007, 18h07

*

COCO D'AMOUR AU POISSON

(en différé de l'Ambassade de Pékin)

Amours enfin sans le poison
Arsenic et veille entre d'elles

Un ami conçoit tout
Un autre perçoit tout

Cocochons d'outre-temps
Quand leur parler est vain

Ce monde à dépasser
Sans mesure en mesure

La confiance revient
Quand la peur se contient

Que de fortes présences
Au coeur de leur absence

Que de bonne patience
En moi ces êtres là

FoSoBo, 9 septembre 2007, 13h48

*

LE BOUCHER ET LA VIE CHAIR
(de l'art ou du cochon ?)
Ils vendaient de la viande
Ensemble
Ils eurent beaucoup d'enfants
 
Il tranchait dans le beef
Elle comptait les biftons
Et les lardons obèses
Mangeaient du steak à chier
 
« Nous dormirons ensemble »
S'étaient-ils cons promis
Est-ce ainsi que les hommes baisent
Entre deux tranches de veau mis ?
 
Le temps passant l'amour aussi,
La grande enfuie végétariennne,
Le petit roulant des merguez,
Ils dormaient en touchant à rien
 
Est-ce ainsi que les femmes vibrent
L'art de vivre ou bien de survivre
Entre les beaufs et les cochons ?
La Plaine, 30 août 2007, 13h25
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