LA VIE QU'ON MÉDITE
« L'enfermement s'abolit » Jacques CAMATTE
On a
On n'a pas
Pas la vie
Pas la vie qu'on mérite
On a, on n'a pas
Pas la vie qu'on hérite
On a la vie qu'on vole
À la vie qu'on nous vole
J'ai fui la vie pluvieuse
La vie plus vieux
La vie plus con
La vie qu'on pense
Pour compenser la vie
Qu'on ne dépense pas
La vie déprise
Qui ne dépasse pas
La vie méprise.
J'ai tout repris,
D'apprendre à prendre
Ce qu'on m'offre
J'ai arraché ma vie
Aux vents mauvais
Et je m'envole
Au vent d'aimerFoSoBo, 6 septembre 2008, 20h23
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MÉTÉODeux grenouilles tombent dans une jarre de lait. Elle ne peuvent remonter, les bords sont trop glissants... La première, anticipant une mort lente et inéluctable, se laisse couler et se noie. La seconde, devant cette même mort, se débat, remuant bras et jambes, tentant de sauter etc... L'énergie du désespoir... Elle remue tant et si bien qu'à force de battre le lait, elle le change en beurre... Et donc peut prendre appui pour bondir hors de la jarre...J'ai cassé mon ombrelleEn tapinoisSans yeux, triste fidèle,Et meurt se noieLa plus belle grenouilleDans un bouillon de nouillesÀ la noixDe ne faire son beurreQuand en est venue l'heureEt la foiJe cherche le lieu d'elleOù je suis moiSans dieu, à tire d'ailes,Émeute émoiFoSoBo, 24-25 juin 2008, 23h56« Le composé émeute (esmote, puis esmuete) vient d'un participe passé exmovita, d'émouvoir (forme non attestée mais reconstituée), devenu un nom, qui signifie émoi puis émeute au sens actuel du mot de soulèvement populaire. L'ancienne forme de meute, muette (attestée au XIIe siècle), a désigné plus tard (1740, dictionnaire de l'Académie) un logis pour les chiens de chasse. Il existe à Paris un château de la Muette qui a donné son nom à un quartier et à une station de métro. On ne confondra pas ce mot avec le féminin de muet, qui vient de mutus, privé de parole. Autres mots de la même famille : mutin, mutinerie, (se) mutiner. » Source, Importance des familles> Sonnets*
DÉCA DITS D'OISEAUX
«... le goût personnel, déjà peu clair, que j'éprouve pour le décasyllabe », Guy DEBORD, à Annie LE BRUN , 5 mai 1993, Correspondance volume 7, p 413
Pie verbeuse défoncée au vers beau
Merle moqueur déguisé en corbeau,Cachant tes ailes, bruant au désir
D'aller, roseau pensant mâle plaisir,
Pondre tes oeufs de douleur à douleur :
Appelle un aigle ! Un oiseau de couleurs !(Traversant le miroir aux alouettes,
Tombant le trapèze sans pirouetteLe poète ne vole qu'en voleur
De lui-même se refourguant son leurre)FoSoBo, 23 juin 2008, 18h07
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COMMENT ÇA VA ?
À Bobby LAPOINTE, Revanche
Commun lundi l'un dit...
L'individu diviseLa semaine qu'il viseAu vain de ses non-ditsLundi vide et sans vieMardi vide et sans vieMercredi et jeudiVendredi samediDimanche on sort le chienOn s'ennuie à loisirBienheureux ParisienAvide de plaisirsÀ raconter lundiEn attendant dimancheUne autre page blancheÀ tourner allourdieDe l'épreuve du tempsQui passe sur le corpsEffaçant les vingts ansEt leur désir d'encoresD'encres à l'ancre mûreDes écrits sur les mursOù se taisent les crisQui attisaient l'espritQuand on prenait la rueDans les bras d'une crueQu'on croyait sans limitesEt qu'aujourd'hui imiteSur le trottoir marchandLe souvenir reliqueAcheté en marchantAssurance tous risquesTouriste à temps completEn vie qui se complaîtÀ repasser les platsSans piment froids et platsSortis des macro-ondesAlimentant le mondePour mieux tromper sa faimEn attendant la finDes haricots cocoDu riz blanc et des rougesRivé au statu-quoTirant sur tout qui bougeAvec des mots qui tuentAuxquels on s'habitueTout passera pardi...Ça va comme un lundi !FoSoBo, 23 juin 2008, 13h39*
AUF ET BING !
Tout a changé tout à changer...
Les casseroles bien rangées
Font leur ding ding à la cuisine,
Le chagrin rend dingue à l'usine,
On y gagne ses sous pour manger
On y perd son temps, managé,
Encodé "sociale machine"
Sur la courbe de son échine,
Valeur d'ennui mis à l'ouvrage
Pour le prix de son esclavage
Et prime en sus pour la fermer...
C'est dur mais ça durera tant
Que les foules n'auront des dents
Pour briser leurs chiens et leurs chaînesAilleurs, 20 juin 2008, 18h16
AUF : Allemand, particule indiquant généralement un mouvement vers le haut. AUF ! = DEBOUT !
AUFHEBUNG : En gros, abolir en conservant, dans la dialectique de HEGEL
AUHEBEN Journal et groupe de théoriciens communistes anglais« Et quant à ce qu'avaient voulu dire les situationnistes en souhaitant le dépassement de l'art, je ne craindrai pas d'employer des mots célèbres pour rappeler que, dans le concept hégélien d'Aufhebung, dépassé et conservé " cessent d'être perçus contradictoirement " ». Guy DEBORD, lettre à Annie LE BRUN du 26 septembre 1988, in Correspondance, volume 7
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LE BONHEUR EN AMONT
L'aboli me parcourtSans me prendre de court
Abattant les cloisons
Et le doute en prison
Qui tuait mon espoir
De voir clair dans le noir
Le secret dont hériteUn coeur qui va si vite
D'une belle étrangère
À la robe légère
Au plaisir sans attente
Autant que faire peut
Autant que dure peu
Le temps d'être vivantFoSoBo, 19 juin 2008, 22h48LA TUMEUR EN AVAL
La folie suit son court
Coule en lui sans secours
Mais il boit sans raison
Les gouttes du poison
Qui tueront tout espoir
De percer dans le noir
Le secret qui habite
Un coeur qui bat trop vite
Dans sa chair étrangère
Qu'une descente allège
Du poids d'être vivante
Autant que faire peut
Autant que dure peu
Le temps mis hors d'attenteAilleurs, 19 juin 2008, 15h28
> Sonnets
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DÉCOUPLAGE
Homme qui n'est qu'un homme
Femme qui n'est que femme
Couple sans lendemain
Vous n'êtes pas mon genre
Trop d'ici sans issue
Trop de manque du même
Trop passable passé
Pour un futur lassant
Dans ces murs divisés
À régner dans l'arène,
Gladiateurs épuisés
De leurs ardeurs si vaines
Qu'ils n'y croient même plus,
Perdus dans leurs rébus,
Médaillant leurs blessures
Par besoin de blé, sûrs
D'y revenir en grand,
En rentrant dans la ronde
Comme on dit dans le rang,
Pour valser hors du monde
Tel qu'il va, sans histoire,
Danser sur leurs déboires,
Tourner sans queue ni tête
Pour fêter leur défaite
En priant la victoire
De venir en chantant
« Vive le désespoir ! »,
Toujours jamais contents,
Usés de mots rusés,
Fiers comme anciens soldats
Vaincus, crânes rasés
Dedans, par leurs dadas,
Sur des chants de soudards
Payés dessous, de l'art
De paraître pour soi,
D'en avoir l'air, la foi,
Sabres et goupillons
De cette âme indivise
Dont ils font religion,
En fantasmes divins,
D'être deux seuls pour tous,
N'étant seul à seul fous
Que d'un « nous » hors du temps,
Mort-vivant à trente ans.FoSoBo, 17 juin 2008, 18h52
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S'WORDS
Endimanché dandy manchot
Du lundi mentant show
Au mercredi chômé
Le sang chaud désormaisLoin des mais, des mémés,
Des toutous, des momies,
De jeunesse endormie
D'infâme effet minée,Loin des contaminés,
De leurs contes vomis
Au bord de la fadaiseQuand rouges sur la braise
Du faire les épées
Tranchent nos destinées
FoSoBo, 15 juin 2008, 18h07
> Sonnets
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DÉ-TERMINÉ
« Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu » Bertolt BRECHT
Le sol dérobé sans critère,
Le sol retrouvé dans mes cordes,
L'ennui repoussé, délétère,
D’un rêve éthéré en discordeLimite. Vif du mort à saisir
Pour en sortir, pas de quartier
À la normose, à son délire,
Aucune place de concorde,Plus d’issue que choisir, sans pitié,
Sans répit, sans repos, sans loisir,
Sans larmes, l'arme de l'amitiéContre le vent mauvais porteur de vains espoirs
Où se mêle au mentir-faux l’aplomb
De l'intime aux semelles de plomb.
FoSoBo, 15 juin 2008, 16h18
> Sonnets
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DÉS HANDY CAP'
Valse blues, à Brownie MacGhee et Sonny Terry, le polio guitariste et l'aveugle à l'harmonica
Nous sommes tous des handicapés
On a cru et parlé et crié...
À quêter l'accessibilité
Sans savoir comment nous garder cap
D'aller loin vivre sans noeuds ni papes
On a rien su que faire et prier...
On a rêvé valser Rue de Lappe...
Le passé fait de nous sa retape
Sur les trottoirs de vente aux gens chers
Prix coûtant, découpés, dés pipés
Du marché quand on marche à ses pieds
Sans danser la pensée d'en sortir
Un jour dur de l'urgence à construire
Sur la ruine détruite du monde
FoSoBo, 11 juin 2008, 20h14
> Sonnets
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MON PROBLÈME
Contre Arthur Rimbaud, Ma bohème
Je m'en irai, point hors de la poche crevée;
Mes amis me seront devenus d'idées all,
L'assaut du ciel amuse, et j'étais si banal;
Ah ! là ! là ! Que de moeurs libérées je vivrai !
Ma tunique parlotte et je fais dans mon froc,
Happy poussé d'hardeur, je décroche mes bourses
Des crimes. Ça gamberge en attendant la frousse.
Sur la toile idéelle avec rêve flou-floc
Et que j'écouterai, debout fort sur la route
De l'espoir d'entreprendre et de sauter le doute,
Ce rouge sous mon front, contre une vaine peur;
Où, mariant mille lieux au nombre des uniques,
Commun des livres, je chanterai la musique
De nos soupirs pressée, nos mains armant nos coeurs !FoSoBo, 11 juin 2008, 17h08
> Sonnets
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DÉ-STRESSÉ
« Il faut s'endurcir, sans jamais se départir de sa tendresse » Ernesto CHE GUEVARA
Ô fils ténus de nos dé-tresses
Retissez-nous de nos tendresses
La toile à l'horizon plus doux
Que l'enfer sur l'écran du temps fou
Quand le vent tombe de l'histoire,
Au désert mouvant d'illusoire,
Oasis mou, conforts assis
Sur les vains cultes avachis
De la défaite sans promesse
- Pieux combats, fausses victoires
Aux fins à jamais transitoires -
De vaincre la meute des loups
Par l'émeute à toutes nos faims :
Brûle, volcan de nos parfums !FoSoBo, 11 juin 2008, 13h12
> Sonnets
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DÉ-NOUS MENT
« Quant à l'antinomie de l'art et de l'amour, elle n'est sans doute qu'un cas particulier d'une antinomie universelle. Si on veut faire les choses profondément, on ne peut à la fois - par exemple, en ce qui me concerne - créer, se cultiver, chasser l'aventure, chasser la gloire, et aimer : il y a toujours une de ces activités qui est trahie. » H. de Montherlant, Les lépreuses.
Le verrou a sauté
Dans le miroir sans tain
D'une vie ligotée
Par les chaînes du leurre
Guettant un faux bonheur
Aux illusions sans fins
Où se perd le regard
Intérieur sur le fardSans balise à ses faims
Qu'un trop maigre festin
Au menu sans cuisine
Où l'art naît en gésineDe s'y donner entier
Et pas aux beaux quartiers
De l'ennui du dimanche
Sans retrousser les manches.*
La vision se déploie
Quand la pensée rencontre
La vérité des lois
Qui viennent à l'encontre,En affrontant l'enfer
Sans le fuire pour faire
Son beurre de son culte
Sur les plateaux incultesOù s'étale en tartine
L'amère confiture
Ou le miel qu'on butine
Sans soigner les boutures,Vite cueillant les fleurs
De la facilité
En habile frimeur
Qui ne sait que planterSes graines desséchées
Dans un jardin d'ailleurs
Sans veiller à bêcher
Le sien pour le meilleur,À créer de ses mains
Sans remettre à demain
Et à d’autres que soi
La pari de sa foi.
FoSoBo, 8 juin 2008, 13h03
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TRISTE
Triste savoir, triste sapience
Triste ruine sans âme
Triste look reluqué
Triste loup refourguéTriste show d'effroi d'être
Triste clown à paraître
Triste clône gaieté
Tristes enfants gâtésTriste vie contestée
Triste sans, triste avec
Triste et sec, triste en bec
Triste bon, triste conneTriste giron de bonne
Triste con qui se donne
Triste amour sans amour
Triste en l'absenceTriste en vacance
Triste rien
Triste tout
Triste madame et son toutouTriste monsieur de ça ma femme
Triste femme au lit sans cieux
Triste molle, triste mâle
Triste bien, triste mal,Bof...
FoSoBo, 7 juin 2008, 23h56
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ÇA SERT D'OS
La jeunesse t'agace, limace.
Sa bêtise te lasse ? Tout passe.Son vide est un supplice ? Narcisse.
Son silence en abysse ? Factice.Laisse rouler carosse, précoce,
Loin de Fée Carabosse, et bosse !Le malheur à la baisse, que fait-ce ?
Foin de la petitesse : hardiesse !FoSoBo, 7 juin 2008, 12h49
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DÉ-LIMITÉ
Généralement, un arbre ayant du lierre meurt entre 50 et 100 ans. Cela laisse généralement le temps à l'arbre pour semer d'autres graines qui auront germé.
Ce que tu perçois qu'il ne peut saisir,
Dis-le sans espoir que le sourd l'entende.
Qui se défend déformant à plaisir
Ne vaut pas la main que tu lui tendes.Qui s'arrange à saisir de travers,
Prends garde au flou de ses raisons,
Changeantes cent fois la saison
Sur son trapèze de pervers.
Qui s'oblige à tout justifier
Tombera se prenant les pieds,
Du haut discours contradictoire,
Qu'il revendique péremptoire,Au bas de ses capacités,
Principe de réalité.Ailleurs, 3 juin 2008, 14h02 - FoSobo, 7 juin, 13h30
> Sonnets
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DÉS-ENFERMÉS
« Pareil à ces bêtes que la claustration et l'idée fixe ont rendues névropathes, Costales, enfermé dans cette cage qu'est un amour qu'il n'éprouve pas, balance d'un côté puis de l'autre » H. de Montherlant, Le démon du bien.
L'enfer me ment si ce n'est moi
Qui jette ses dés au hasard
Geste concédé à l'émoi
Jusqu'à y bazarder ses arts
L'enfermement si ce n'est toi
C'est donc un ami sans César
Ton frère ou ta soeur qui nettoie
D'un coup de torchon en blizzard
Lent ferment de belle amitié
Bradée pour de justes querelles
En purs chagrins et sans pitié
M'enferre. Qu'en faire ? Qu'en taire ?
Ont raison de toi, son coeur, elle...
À l'étroit dans ses rêves sans terre.FoSoBo, 2 juin 2008, 12h04 - 8 juin 15h37 - 13 juin 17h17
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DÉ-COLLAGE(S)
Je suis l'avion de mes désirs
Prisonniers de son fuselage
Sur une piste qu'use l'âge
Et tournent court de vains loisirs.
Je suis champion pour obscurcir
Les horizons d'un décalage
Entre collage et décollage
Sous un ciel que je vois noircir.
J'ai la passion du bavardage,
Mais ne fais rien que saisir
Ce qui se joue à déjouer
Les enjeux de ce cafouillage,
Comme si je nouais à plaisir
Les fils dont nous est (s)tressé.FoSoBo, 2 juin 2008, 2h05-20h50
> Sonnets