People in me, Jazz sur paroles
Suite pour quintette
(projet, état du 28 février 2001)
Il s’agit d’une suite, composée/arrangée, pour une formation de jazzPeople in me est le titre d’une chanson d’Abbey LINCOLN (texte in fine), qui traduit la « philosophie » générale du projet.
La suite comporte 12 thèmes sur 12 titres, correspondant à 12 poèmes : le scénario.
Le titre indique l’élément central, l’idée principale, de chaque thème.
Comme le ferait Strange Fruit, de Billie Holiday.
Le texte du poème joue le rôle des paroles d’un standard, qu’on ne chanterait pas, mais dont on n’aurait pas oublié le sens.
Penser à Lester Young.
La suite est conçue dans la perspective de concerts, et éventuellement d’un album. Jazz sur paroles en résume le concept.
le scénario musical (voir synopsis)
C’est en quelque sorte le livret de la suite.
Il est construit en 3 parties de 4 thèmes-titres chacune :
- L’éveil, le travail, la marche, le repos ;
- L’argent, la guerre, la paix, la justice ;
- L’océan, l’amour, la beauté, l’oiseau.
Le scénario suit vaguement le déroulement d’une journée.
Chaque titre est né de la libre interprétation d’un poème, pré-texte du thème musical.
12 poèmes ont été choisis, provenant du monde entier (sauf de l’Europe, où nous sommes et dont nous sommes) :
- 3 africains : peul (Cameroun); wolof (Sénégal); kabyle (berbère d’Algérie)
- 3 orientaux : hindi (sanskri, Inde); japonais (haïku); hébreu (Jérusalem)
- 3 américains : navajo (Indiens SO-US); anglais (Baldwin/ afro-US); français (L-G Damas/Guyane)
- 3 océaniens : inukitut (esquimau/Arctique); hawaïen (Pacifique) ; malgache (Océan indien)
Ces poèmes (la plupart tirés d’un livre pour enfants) ont été choisis pour leur origine, leur simplicité, leur sens, leur pouvoir évocateur, leur force...
Le titre assure un passage entre le texte du poème et la musique.
La musique n’est ni une chanson, ni un accompagnement musical, ni une illustration collant aux textes. Les poèmes sont là pour inspirer des émotions, un climat, des images sonores, des idées musicales... liés à un sujet, une situation, indiqués par le titre.
Ainsi est instauré délibérément un double, voire un triple jeu, de références et décalages, entre le poème, son origine, le titre accolé, et la musique. C’est dans ce jeu de détournements et distanciation, dans ces va-et-vient entre le sens et l’expression, que se glisseront le parti pris des arrangements et la liberté des musiciens-improvisateurs.la musique
Ni World-Music, ni musique ethnique, c’est du jazz moderne.
La moitié des thèmes sont empruntés à des compositeurs connus et choisis :
Dollar Brand (Abdullah Ibrahim), Mongo Santamaria, Kurt Weil, Thelonious Monk, Charles Mingus, Antonio-Carlos Jobim.
Les 6 autres, en alternance, sont des compositions originales, écrites pour la circonstance. Leur rapport au texte est donc plus évident et direct que celui des thèmes empruntés, pour lesquels le lien relève davantage des arrangements et repose plus encore sur les musiciens.
A titre d’exemple, le poème kabyle (Petit peuplier...) donne la parole à une femme restée au village, son homme parti à la guerre. Le titre : la guerre. Le thème musical, Pannonica, de Monk, n’est pas a priori une musique illustrant la guerre...
Par conséquent, chaque thème musical est sollicité/détourné par le titre qui, lui-même, tire/interprète le poème. Et réciproquement.
Les orchestrations exploitent les diverses possibilités instrumentales et les couleurs sonores au sein d’une formation réduite, offrant à chaque musicien un terrain pour exprimer sa personnalité musicale. Les arrangements empruntent les différents rythmes ou formes du jazz : afro-cubain, blues, ballade, bossa, swing... genre standard, modal, contrepoint... improvisation individuelle ou collective.
Ultérieurement, sans remettre en question l’équilibre d’ensemble, des modifications pourront être introduites : remplacement d’un titre-poème, d’un thème musical.la formation instrumentale
La suite est écrite pour un quintette (éventuellement ramenée à 4, ou portée à 6 ou 7), chaque musicien ayant un instrument principal, et pouvant éventuellement doubler sur d’autres (notamment percussions, voix) :
- Clarinette (en Bb et clarinette basse + sop et alto sax ) <
- Ténor sax (si possible flûte)
- Guitare
- Clavier (vibraphone, marimba... clavier-synthé), percussions et drums
- Contrebasse ( éventuellement seconde guitare)L’écriture et les répétitions explorent dans cette formation les sous-groupes possibles (duos, trios, quartets).
Le sextette permettrait d’avoir en permanence un clavier et un batteur, ou deux percussionnistes etc...
Le quartet est possible soit sans clavier ni batterie (cl, ts, g, cb) soit plus classique (cl ou ts, g ou p, cb, dms)
Ultérieurement, une chanteuse ou « récitante » pourra être ajoutée, des costumes, décors introduits ...
les références esthétiques
Du point de vue du son de groupe, des arrangements :
- Benny Goodman, sextettes, avec Lionel Hampton et Charlie Christian ;
- Red Norvo, en trio vib, g, cb (avec Tal Farlow et Ch. Mingus), ou en sextette fl,cl, vib, g, cb, dms (avec B. Kessel, Buddy Collette, Shelly Manne...)
- Teddy Charles (vib, avec Jimmy Giuffre, ou Jimmy Raney g)
- Jimmy Giuffre (cl/ts, avec Jim Hall g et Red Mitchell cb)
- Chico Hamilton (dms, avec Collette, Dolphy, Jim Hall...)
- Cal Tjader (vib, avec Mongo Santamaria, percu)
- Gary Burton (vib, avec Corryel, g ou Keith Jarrett, sax soprano)
- Eric Dolphy (à la cl en Bb...), dans Music Matador, Out to Lunch (avec Bobby Hutcherson (vib)
- Dave Holland (Prime Directive, quintette sans piano, avec Steve Nelson, vib)
Plus, évidemment : Ellington, Basie, Kurt Weil, Gil Evans, Mingus, Dollar Brand ..., particulièrement en petite formations.
les textes des poèmes
1) L’EVEIL
Amadou Hampâté Bâ (Peul, Nord-Cameroun)
LOOTORI
Levez-vous ! les poules du villages ont crié ;
les ânes ont brait à s’en lasser ;
les oiseaux se sont éveillés ; les hyènes ont filé ;
le caméléon est entré dans la rosée et voici le calao qui cherche à s’envoler
Lôtori ! Lôtori, conduisez les troupeaux à la mare de Béla !MUSIQUE :
African Marketplace ou medley (Dollar Brand)
2) LE TRAVAIL
Kedarnath SINGH (Hindi, Inde)
CHANSON DU TISSAGEDebout, mes fils endormis
Voici venu le moment de tisser
Debout
Debout, la machine à coudre du tailleur est déjà en marche
Debout, le blanchisseur est arrivé sur la berge
Debout, les enfants nus comme des vers sont en route pour l’école
Debout, les fils qui tissent mes matins, debout les fils qui tissent mes soirs, debout
Debout, le métier va être à court de trame
Debout, il y a eu de la bagarre quelque part
Debout, il va falloir tisser à nouveau tous les vêtements de ce monde
Debout, mes fils cassés,
Et vous mes fils emmêlés debout
Debout
MUSIQUE :
entrelacs mélodiques, en canon ou fugue
Tickle Toe (Lester Young/ Count Basie), écrire trois fragments joués simultanément/alternativement par chaque instrument, la basse assurant le défilement rythmique.
3) LA MARCHE
Anonyme esquimau (inuktitut )
PAROLES POUR ALLÉGER CE QUI EST LOURD
Je marcherai avec les muscles
des pattes du petit caribou
Je marcherai avec les muscles
des pattes du petit lièvre
J’hésiterai d’aller vers la nuit
j’irai vers le jour
MUSIQUE :
Afro Blue (Mongo Santamaria)
6/4 , en conservant le caractère latin de l’original (# versions Coltrane...)
4) LE REPOS
Cheik Aliou NDAO (Wolof, Sénégal)
MIDI (extrait)
Voici que l’air s’immobilise
Pas une aile d’oiseau
La cigale a délaissé l’archet de son violon
Aucune cadence du pilon de Kumba
Ô femme pas une graine de mil
Concassé sur ton van
Midi tu me fais peur
Tu as éparpillé tes braises
La femme assise à l’ombre
Tresse les cheveux de ses compagnes
Femme à l’affût d’un imprudent
Midi tu me fais peur
Voici que l’air s’immobilise
Comme du lait caillé au fond
D’une calebasse
MUSIQUE :
Modal , harmonie stagnante (penser à Gil Evans), sur ostinato de basse
5) L’ARGENT
James BALDWIN (afro-américain)
CHANSON (pour Skip, extrait)
Time is not money.
Time is time.
You made the money.
We made the rhyme
Le temps c’est pas de l’argent.
Le temps c’est le temps.
Vous avez fait l’argent.
Nous avons fait le chant.
MUSIQUE :
Opéra de quat’sous, medley (Barbara song...) Kurt Weil
6) LA GUERRE
Anonyme kabyle (berbère d’Algérie)
PETIT PEUPLIER DU PLATEAU
Petit peuplier du plateau
Tu verdoies et portes ombre
Du temps que mon amour aux beaux yeux était là
Il avait coutume de s’asseoir à ton ombre
A la guerre il s’en est allé
Tu jaunis et tombes presque
MUSIQUE :
Pannonica (Thelonius Monk)
7) LA PAIX
Yehuda AMICHAÏ (hébreu)
JERUSALEM
Sur un toit de la vieille ville
une lessive dans l’ultime lumière du jour :
le drap blanc d’une ennemie
la serviette avec laquelle mon ennemi
essuie la sueur de son front.
Dans le ciel de la vieille ville
un cerf-volant .
Et au bout du fil,
un enfant
que je ne peux voir
à cause du mur
Nous avons hissé beaucoup de drapeaux,
ils ont hissé beaucoup de drapeaux.
Pour nous faire croire qu’ils sont heureux.
Pour leur faire croire que nous sommes heureux.
8) LA JUSTICE
Léon-Gontran DAMAS (Guyane, extrait de Black Label)
NOUS LES GUEUX
Qu’attendons-nous
les gueux
les peu
les rien
les chiens
les maigres
les nègres
pour jouer aux fous
pisser un coup
tout à l’envie
contre la vie
qui nous est faite
à nous les gueux
à nous les peu
à nous les rien
à nous les chiens
à nous les maigres
à nous les nègres
MUSIQUE :
Better git in your soul ou medley (Charlie Mingus)
9) L’OCEAN
N-B EMERSON ( Hawaï)
LE CHANT D’HI-AKA AU CAP LANI-LOA
le cap Lani-Loa vole
et se jette, plongeur,
dans une mer tranquille
L’alizé souffle.
Une vague montante, au pied des falaises,
s’agrippe aux embruns ;
L’océan escalade une colline.
MUSIQUE :
How Insensitive (Antonio Carlos Jobim)
voir si possibilité de doubler le thème en samba, de créer un interlude ou un passage rapide pour un solo donné
10) L’AMOUR
Anonyme malgache (Madagascar)
JE SUIS LE RIZ
Je suis le riz, et vous êtes l’eau :
Ils ne se quittent pas dans les champs,
Ils ne se séparent pas dans le village ;
Mais à chaque fois qu’ils se rencontrent
C’est entre eux un amour nouveau
MUSIQUE :
médium lent, balancé
Jimmy Lunceford ou cubain, sur deux accords, rhumba ?
11) LA BEAUTE
Anonyme Navajo (Indien du Sud-Ouest USA)
CHANT DE LA BEAUTÉ
La beauté est devant moi
et avec elle je me promène
La beauté est derrière moi,
et avec elle je me promène
La beauté est au-dessus de moi,
et avec elle je me promène
La beauté est autour de moi,
et avec elle je me promène
MUSIQUE :
ballade mais pas molle
ambiguïté du doublement (Abbey Lincoln)
Eric Dolphy, Out to lunch (something sweet, something tender)
noire = 60
climat coltranien ?
12) L’OISEAU
Ozaki HOSAÏ (Haïku, Japon)
Dans le soir
Sur une seule patte
Moineau sautillant
MUSIQUE :
léger, décalé, déhanché
noire = 84
randy Weston (little niles)
voir mélodie en contrepoint utilisant un mode japonais, avec des rythmiques combinées de 2/4, 3/4, 4/4, 5/4, 7/4
People in me
(Abbey Lincoln)
Some day the world is cold and that it’s hard to find a friend.
But every him we’re down and out, somebody takes us in.
Sometimes somebody’s wicked and sometimes somebody’s true
But there will always be somebody stickin’ with you and me.
Because the people we know are the people who say...
i got some Indian in me,
i got some Irish in me,
i got some Hawaiian blood,
i got some people in me,
i got some people in me, i got some people in me,
i got the whole of Africanus, turnin’ in me.
i got some Chinese in me,
i got some German in me,
i got some Japanese blood and blood from Vietnamese in me,
i got some people in me, i got some people in me,
i got the whole of Africanus, turnin’ in me.
i got some Jewish in me,
i got some Arab in me,
i got some Mexican rose,
i got some Russian in me,
i got some people in me, i got some people in me,
i got the whole of Africanus, turnin’ in me.
i got some lesson in me, i got some college in me
i got what every people know right now, inside of me,
i got some children in me, i got some children in me,
i got the whole of Africanus, turnin’ in me.
i got some Guinee in me,
i got some Ghana in me,
i got some Zairewah blood,
i got some people in me,
Dahomey in me, Uganda in me,
South African blood, i got some people in me
Barundi in me, Tanzania in me, Algerian blood, i got some people in me,
What you see in me,...
Hey hey hey,
i got some people in me,
Seirra Leonne in me, Mozambique in me, some Egyptian blood,
i got some people in me, ...................