VIII 6 SÉRIE BÉE, mars 2005

*

SANS ROUPIE YÉ YÉ YÉ

l'étourneau sans sonnette
censé né sans sono
tourne haut la chansonnette
catalogue d'oiseaux

disons qu'il a bon bec
pour de pure salade
offrir la sérénade
à la grand dam... oiselle

rendre la pie qui chante
jalouse du moineau
séduire la corneille
à la barb' du corbeau

et de flûte méchante
pis que le perroquet
polyglotte d'oreille
du merle se moquer

il est inouï son zèle
à la nuit imitant
des chants qui n'iront d'aile
annoncer le printemps

au ciel réjoui un soir
de si beaux sons honnêtes
alors que ton espoir
roupille en sens au net

FoSoBo, 31 mars, 22h21

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PROSE PROBOSCIDIENNE (et zoologique)

«Il me dit que je se suis bien gentil, en d'autres termes que je suis un zozo» (MONTHERLANT)

"Partir des mots et faire qu’en quelque sorte ils pensent pour moi (me dictent au lieu d’être dictés par moi…" (Michel LEIRIS, Langage Tangage)

Ah ? partir du mot ment ? Allons-y voir !

Les éléphants du zoo de Vincennes partent pour l'Allier : qui s'y trompe ? Car ce n'est rien moins qu'un moment de la décolonisation ! Trop lourds pour le béton de leur prison parisienne, les mastodontes s'exposent à l'universel, déconcentré en province. C'est un début de reconnaissance tardive du crime de l'humanité urbaine contre les gomphotères*. La repentance assumée de la traite pachydermique. Pour mémoire, mais... défense d'y voir de trop près.

Foin d'aparté. Revenons au moment où partir du mot ment énormément.

J'aime que les mots m'étonnent, quand ils marronnent hors de la page des journaux. J'aime qu'ils passent le mur du son pour s'affranchir d'un esclavage de tâches silencieuses enchaînées aux habitudes des jours, dans le bruit blanc des sémantiques certitudes de l'époque, alignés à la queue leu leu en phrases qui les serrent entre de piètres points en pitres mystifiés, engrossis en titres miteux, entassés en chapitres promis à la lecture rapide, payant leur écot sans licence, sainte taxe de leur orthographique correction, fouettés par une grammaire prude et sans âge, aliénés au non-sens de leur séparation par un dictortionnaire interdisant jusqu'à l'écho de leurs tambours. Sans jugement. Sans avocat. Marrons.

En son procès sans son comme en ses sons saucissonnés sans assonnances, la langue a décrété, pour le langage et par les mots, leur peine de mort.

Partir c'est revenir un peu d'où l'on croit vivre, par soi-même libéré. Le langage et les mots le sont par le poème, qui leur est un voyage à l'étranger, qui bande et chante encore, quand rien ne semble plus pouvoir changer, la vie.

Ah ! oui... En japonais, éléphant se dit Zo. Oh ! logique...

Mais à partir du moment où... on n'arrive nulle part.

* "Dans l'histoire évolutive des proboscidiens, la famille des éléphantidés (à laquelle appartiennent les éléphants actuels) est issue de la lignée des mastodontes, et plus particulièrement du groupe des gomphotères (Gomphotherium). Le premier représentant en est le genre Primelephas, apparu au miocène, il y a 5 ou 6 millions d'années. C'est lui qui est à l'origine de la famille des éléphantidés, qui réunit les mammouths, apparus vers - 4 millions d'années, et les éléphants. Elephas antiquus (qui a vécu de la fin du pliocène au quaternaire inférieur) est probablement l'ancêtre direct des éléphants actuels." Source : Encarta

RER A, 29 mars 2005, 19h33

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MA CHATTE

Théophile-Alexandre STEINLEN)

Si tu veux ma chatte
attraper la mouche
ne crains qu'elle touche
au bout de ta patte

Tu n'es guère adroite
que pour mettre en bouche
de boîte si louche
le pâté de rate

Mon pauvre Steinlen
que sont tes félins
si fiers devenus

Ces chats de gouttière
à la griffe altière
Minette ingénue

FoSoBo, 28 mars 18h25

LA MOUETTE

Nicolas DE STAËL)

Vois cette mouette
envolée de beau 
et lève la tête
vers elle en vol haut

Bel oiseau poète
loin du noir corbeau
de l'œil sois la fête
en l'air et dans l'eau

Fais rire de Staël
rimé à ton aile
d'un si pur destin

Envoie-moi en terre
en volant le ver
d'un trop bas instinct

FoSoBo, 28 mars, 17h42

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SAKÉ SHIRAKU ?

Djaku Shirak à Ôsaka
vend le Japon d'hier 
le prix d'un gros sac 
à la France demain clap clap

Sacré Chirac ! où ?

Vante à tous vents l'Europe hop hop
cause toujours c'est ailleurs
et boit du saké c'est meilleur
sans sushi mais si merci beau coup

Saké Shiraku

Conte en-dessous du sumo la ceinture
et prends-nous pour des jacques
au cas où zou !?...

Saqué Chirac ? hou !

FoSoBo 23h47

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MUET COMME UN PAPE

A mon fils, Nicolas

Cueille le jour où le pape se tut
muet comme une carpe en chocolat
fenêtre du palais le choc est là
que vive le poison dans l'œuf qui tue

A Pâques et pour le coup destitue
le prêche Écoute-moi donc Nicolas
mon fils ne dis jamais à un prélat
« Mon Père » il serait sinon bien foutu

De te filer le virus qu’il radote
envers la vie et l’amour sans capote
(quel beau vers doux renversé satanique)

Cueille les heures garçon carpe diem
cours au bonheur de la fille
qui aime
sans culte pieux ni discours adonique

FoSoBo, 27 mars, 21h22

*

BLUE GAMME BOY

Ma bêtise serait à saisir
l'occasion d'un plaisir
si d'effroi n'était le frisson

Dans mon dos

Sourd à mon opinion
médisant oui séduisant non 
ce macchabée hante mon vide

Réfrigé

Livide hiver de ma raison
ma bêtise est hors de saison
et m'alite à l'été d'un coma

De momie

Ouvrant la béante crevasse
où tombe lente en lice
la pulsion écrevisse

D'un vice en fat

Voulus-je maudissant
ce mauvais sang dans ma déveine
qui coule ainsi sa peine

En mon sous-sol

Enterrer à deux mains
mes sales manies d'hier
dont je suis si peu fier

Et si las

Ayant perdu le diapason
pinçant la gaie passion
de rire à l'unisson

De mes soucis

Piqué comme hérisson
retourné par hantise
d'avoir l'air bête

Sur le dos

FoSoBo, 27 mars, 18h34

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RUDE CONDICTION

(étude et variation sur un thème consacré III)

Le cocochon court à confesse
dans les bars tard le soir
depuis trente ans il est l'ami
ennemi de l'espoir
abonné aux retards soumis 
à la promesse
de son culte

L'histoire passe
le cocochon là boit
âne que rien ne lasse

la tasse quand «les gens»
se cassent de l'agence...

Poil aux fesses

FoSoBo, 24/28 mars

*

TROUER LA PEAU

La poésie troue la peau du poète
pitre roué en pirouette
qui contrepète en dessous de son culte
cathartique à tactique
et catapulte la culture
par sa culbute déculottée

La poésie n'a pas d'odeur
mieux eût valu
qu'elle pût
Sa plus-value
c'est l'hardeur
dont elle sue

Elle sent sans le savoir
nous le savons, la poudre, pas la savonnette
le sens sans encens ni l'escampette
au lavoir dans l'avoir
où trop que ça vous n'êtes

Quand craquent les dessous
la poésie point n'hésite Elle
ne fait pas dans la dentelle
elle entend que ça pète
pour bien plus que deux sous

Pour autre chose que des mots
la poésie fait ce qu'ell(e) peut
fort peu
mais ne l'envoie pas dire en vers
de l'almanach Vermot

Elle n'est pas démo-
cratique elle est ultra minoritaire
mais pour rien ne met à l'envers
un talent adroit même hâtif

Elle a le goût de l'absolu
quand tout est relatif
Aragon ne l'a pas résolu
en optant pour se taire

La poésie n'est pas protestataire
à se prostituer pour toi
à conspuer les gens d'affaires
à faire ici la pute
sur les trottoirs littéraires
elle est sans prix, gratuit(e), sans but
et préfère
jouant sous les toits
en mère putative soumettre
l'insoumis en sa lettre

Amie sans sou aux cent soucis
qu'est-ce d'épargn(e) : aussi

La poésie n'a pas d'odeur
mieux eût valu
qu'elle susse
la sûre valeur
des abus
dont elle ruse

La poésie troue la peau du poète
pitre roué en pirouette
qui contrepète en dessous de son culte
cathartique à tactique
et catapulte la culture
par sa culbute déculottée

Trop à laisser lassée de prendre
la poésie fait à l'amour la vérité
elle n'a pas à vanter
ni à vendre
tout dans le ventre
à inventer

RER A, 24 mars, 8h35

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LE BOGUE ARÇON

(étude et variation sur un thème consacré II)

Lancinante répétition 
d'une partition d'habitudes
Rossinante en révolution
sur un manège à certitudes

Tourne sans improvisation 
de rassurantes idées prudes
sur l'air d'un hymne à la nation
confondant coda et prélude

Langue de beauf cheval de bois
à dada sur son bide aux abois
de ses pets faisant don quand il trotte

Un cocoboy monté en croupe
mouton bêlant en molle troupe
vole au moulin rouge en Quichotte

RER A, 21 mars, 8h 09

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OGRE RÊVE

(la voie royale ou la gelée ?)

L'oubli d'un songe efface au matin l'aventur(e) noctiluque
et l'amnésie sans tain dans un miroir fait face
à la mémoir
(e) sans trac(e) d'un souvenir eunuque

Ainsi s'en va la nuit
la clarté s'évanouit
de vérités omises
sans mensonges émis

Ainsi le vrai s'enfuit
la fausseté s'ensuit
qui porte la méprise  
ennemie des amis

On raconte une histoire où dort la noctambule
avec le faux espoir d'un avenir en bulle
que le présent éclate

Ainsi le funambule
se croyant acrobate
la corde au cou se passe
raide sans compromis

FoSoBo, 20 mars 2005

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L'ESPRIT DU COCON

(étude et variation sur un thème consacré I)

A perdre haleine le mouton
du ton mou tricolore
tri-coté du cocon
passe les plats du repentir

Mentant comme il aspire
à être plus qu'au net
son nombril sous le nez
c'est sur d'autres qu'il tire

Déformant tout propos
croyant de bonne foi
répondre à fleur de peau
jaune il rit plus d'un
(e) fois

Ce plouc suivant les masses
à l'avant gardé d'elles
se trémousse et surpasse
un passé idéel

Quichotte au don virtuel
l'homme singe en forum
le songe habituel
promis aux braves pommes

Pour ses rares fidèles
n'ayant pas acheté
au prix leur lâcheté
ses rachats sont assez

La vérité n'étant jamais le con-
traire d'un mensonge L'écho
sort à son comble les cocos du cocon

(FoSoBo, 12 mars)

* 

DÉRIME AKADANSÉ 

(8 mars > 11 mars) 

Dense la vie au vide ange des moi
le diable au corps en accords entendus
entre nous de fortune et par nos sangs mêlés
une vie passe une autre vient tendue
de folies centrifugues embellie

Bas les pattes canards domestiques
en coins coincés sans point danser
jamais sur nous et toujours au passé
simplet plus que parfaits de vérités  
gluantes morales d'outre-temps

Jusqu'où tombera le mot espoir
d'abandons en grotesques parades
paravents de panades par avance
noyé sous les hauts fonds des souamis 
à la molle voyance des ramasseurs de bonnes poires

Des rabatteurs de foire et surenchères
pour un oui pour un non contrariés
pour un rien ne sachant plus à quoi il rime
brassant leurs mots de bâteleurs en bavardages
de vieillards avant l'âge et déjà plus que morts

Incontinent de suffisance un continent
vieux comme le monde s'enfonce 
dans sa fosse d'aisances pour gens bons 
à la hausse à moëlle substantive 
de mots doux en maux durs de toc en stocks
de méga fard en métaphore hurlante
avec les louches escarpant l'Olympe

Triste très triste affaire les affaires 
des petits gars légers à grosses galéjades 
roulez galets la plage est sous la grève
c'est de bon ton rouler quand le train
traîne que la chaîne déraille 
que vaille des exploits stations que baille 
un gosse en grâce de paresse

Faut-il encore que paraisse
le signe ostentatoire d'une bataille décisive
et les faits d'armes cathodiques de tant de généreux
interchangeables d'un jour d'un siècle à l'autre
à qui vend à qui vante où tournera le vent
pour déployer les zèles des élites
sans cesse ressassant des litanies d'âneries

"Retour à la normale" à la norme à l'énorme 
et vulgaire équation quotidienne
premier degré du chagrin avec ou sans tôlier
dans l'usure de passions sans désir
pour une usurpation sans azur assurée
aux parfums délétères de l'ennui et du temps suspendu
à son vol régulier par habitude séculaire
de rêves interdits aux simples gens honnêtes

Pourtant encore
trouver le souffle
et marcher sur les braises
comme on valse au petit matin
avec la douce oiselle du printemps

(en marchant, 8 mars > 11 mars)

*

TOUJOURS JAMAIS

Un oiseau juvénal
L'oeil frais et le ton beau
Survole l'amoral
Au-delà des nous veaux

Franchit les murs d'enceintes
Où les chiasseurs militantaires
Entristent par le bas du culte de leurs saintes
Raisons des tas des mots cratères

Un monde si possible si là si las si lent si blanc
Qu'un troupeau de toiles cirables
Dans le musée des siècles sonnant le glas gluant des glands 
Suspendus à leurs chaînes durables

Accrochant des jeunesses de vieux
A des vieillesses de pompiers
Pyromanes dans les boutiques d'hôtels-dieux
Du même étalé à leurs pieds

FoSoBo, 4 mars 2005

IndexDE STAËL Nicolas ; LEIRIS Michel (écrivain, ethnologue) ; MONTHERLANT Henri de (écrivain) ; STEINLEN Théophile-Alexandre
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