II1.1 le jazz de la Nouvelle-Orléans et la mentalité africaine

Nous allons faire halte à la Nouvelle Orléans des débuts du jazz, où ces sources profondes sont mises en évidence dans un article de Pierre MINNE : Une résurgence de la mentalité africaine aux USA : La musique de jazz de la Nouvelle-Orléans », publié dans Présence africaine n°77, 1er trimestre 1971, c’est-à-dire en même temps que Free-Jazz Black Power.

Dans ce texte, Pierre Minne se propose de

présenter une résurgence de la mentalité et de l’esprit africain, dans ce qu’ils ont de plus original et de plus profond, et justement dans le groupe afro-américain* qui paraissait le plus détaché des influences africaines. 

*c’est-à-dire aux USA, l’Afro-Amérique concernant aussi le Sud-continent et la zone Antilles-Caraïbe.

L’auteur ne s’y appuie pas fondamentalement sur des caractéristiques musicales ou sur une comparaison terme à terme d’éléments musicaux de la musique new-orléannaise et de celle de l’Afrique traditionnelle. Il interprète le fonctionnement profond de cette musique :

Le jazz de la Nouvelle Orléans reposait en effet sur l’intégration totale de l’individu en un tout unique, sur sa fusion dans un ensemble organique. L’improvisation collective imposait la dissolution, l’absorbtion de chaque exécutant dans un ensemble unanime, et la fusion de chaque partie dans une symphonie unique dans laquelle elle devait se confondre et qui naissait de cette confusion même. 

Pierre MINNE, ouvrage cité, p. 114

Après une présentation des éléments constitutifs de la mentalité africaine - esprit de la communauté, possession par les Dieux, philosophie africaine - Minne montre comment la musique de la Nouvelle-Orléans présente avec eux des caractères communs, dont sont porteurs : la fonction du thème, l’improvisation collective, les interactions entre chaque musicien et le groupe, le rôle des sections rythmique et mélodique, l’ordre particulier qui s’établit entre le cadre formel, la hiérarchie, et la liberté, l’indéterminé, dans le temps et l’espace etc.

l’esprit de la communauté : le groupe

dans les pratiques sociales et religieuses de l’Afrique traditionnelle :

... la notion de communauté - communauté actuelle, sociale, parce qu’elle repose sur une base religieuse, mythique, est déjà communauté mystique. Et à ce sentiment de la communauté est lié celui de la réciprocité constante, tous deux n’étant d’ailleurs que la projection sur des plans différents d’une même notion, celle de participation. (p. 115)

Cette dimension concerne n’importe quel groupe : quelle que soit

son étendue dans l’espace et dans le temps - une petite communauté locale ou la Négritude toute entière (...) le groupe est un tout organique, indivis, une unité. 

La notion de communauté, de solidarité réciproque, principe essentiel de l’Univers, modèlera la vie humaine et divine, et donnera aux formes de l’activité religieuse comme à celles des rapports sociaux leur teinte caractéristique, celle d’un système d’échanges et de coopération dans lequel, à quelque niveau qu’il soit, chaque membre de la communauté dépend de tous les autres.  (p. 115)

La communauté implique donc une réciprocité et une continuation d’obligations et de charges... chacun attend des autres ce qu’il est prêt à leur donner, le meilleur de lui-même, de son travail, de sa ferveur, de sa dévotion - ou de sa puissance. 

Ce qui entraîne (...) une distribution des charges et des fonctions. Chacune de celles-ci est exclusive des autres, mais en même temps toutes sont complémentaires. Chacun est aussi utile et nécessaire que n’importe quel autre, d’où une hiérarchie rigide, mais qui a cette particularité essentielle qu’elle ne se fonde pas sur une disparité des valeurs, sur une inégalité, mais sur la différenciation des rôles dans leur équivalence, et leur réciprocité. 

Aussi indispensable que tout autre à la vie du groupe et à l’action commune, chaque individu se sent sur un plan de parfaite équivalence avec tous, puisqu’il est aussi nécessaire dans le concours commun. (p. 116)

Partant de l’idéal africain (et ne parlant donc pas encore à ce stade du jazz), il poursuit :

Grâce à la répartition des fonctions, l’oeuvre individuelle s’abolit dans la tâche commune. Nul ne peut se passer des autres...  et c’est la diversité qui rétablit l’unité profonde de la communauté (p. 117)

la philosophie africaine

Epistémologie et non métaphysique, plus souple que l’occidentale, (la philosophie africaine) reste très près des faits, engagée dans la réalité concrète, orientée vers l’action plus que portée à l’abstraction, de telle sorte que la participation s’épand dans le temps comme... dans l’espace

et que « l’état présent d’un élément d’un ensemble reflète l’état général de tout l’ensemble » et leur mouvement même :

Le devenir, en germe dans le présent, consiste en une série d’états, de moments qui s’engendrent les uns les autres, non en se déterminant de façon linéaire et absolue, comme en physique classique, mais selon une nécessité de type biologique.(p. 118)

Alain GERBER retour d’Afrique rapporte sa perception de cette dimension, et complète cette description de la philosophie africaine :

A l’écoute de l’Afrique, dont j’étais l’hôte, en 1967, ces lignes (...) :

« ... Le fond du problème, c’est que la musique ne se contente pas d’exprimer les sentiments. Elle les propose aussi. Or c’est là une conception de plus que reflète les philosophies de l’Afrique »

Alain GERBER, Le cas Coltrane, 1972, Red 1985, p. 120

la possession par les Dieux

Celle-ci est soumise à des règles, à un canon, et dans ses manifestations et dans ses conditions d’apparition. Elle s’effectue quand elle le doit, au moment déterminé, et ni le désir d’être élu ni la volonté de refus ne semblent être déterminants. (p. 119)

Les manifestations en sont « d’ordre intime », et ensuite

d’ordre liturqique, la possession devait s’intégrer dans l’ensemble de la cérémonie, dirigée par les tambours, eux-mêmes Dieux, et en respectant l’ordonnance générale. (p. 119)

La possession n’existe pas. Il y a des formes, des types, un schéma de la possession... Chaque possession est unique, profondément originale, improvisation libre et toujours renouvellée, mais s’organisant à l’intérieur d’un cadre fixe.

Le principe de l’ordre est non la contrainte mais la convenance, et l’expression de sa nécessité comporte une certaine laxité dans sa forme, et même dans l’obligation. Le devenir, le redevenir postulent la similitude et non l’identité, et sont reconstruction et non reconstitution ni reproduction.

Le devenir doit correspondre au passé, mais ce passé n’assure que des dispositions préalables à l’intérieur d’un cadre établi. Il propose un thème, un schéma, mais laisse une certaine disponibilité, et l’état actuel reproduit, avec d’infinies variations, les états précédents qui subsistent en lui dans leur essence. (p. 120)

 

LEROI JONES rapporte puis commente cette citation de W.E.B. DUBOIS :

« Trois choses caractérisent cette religion de l’esclave. Le prédicateur, la musique et la frénésie. »

Chez le musicien noir, même de tendance profane, ces trois aspects de l’Eglise noire se combinent ! La forme de la majeure partie de la musique noire se trouve même dans la structure « appel-repons » qu’utilisent le prédicateur et l’assemblée des fidèles. En outre, la réaction responsoriale du public dans les boîtes de nuit ou les salles de concert est à peu près identique à celle d’une fervente assemblée. Il y a des « oui, messieurs », il y a des « ouais » et même des « Amen » lancés en direction du musicien, et pas seulement les murmures silencieux de l’Occidental assistant à un concert (...)

Dans cette vibrante ferveur que nous percevons à l’écoute d’une chanson noire, il existe le phénomène ancestral de possession par l’Esprit qui se remanifeste, que le chanteur soit Aretha Franklin, Shirley Coesar, Little Jimmy Rushing, James Brown, Stevie Wonder, Joe Le Wilson ou Sarah Vaughan.

On peut significativement lire les lignes qui précèdent avec un double entendement : de la tradition africaine et du jazz.

le jazz néo-orléanais et la mentalité africaine

Après cet exposé des éléments constitutifs de la mentalité africaine, il aborde les constituants de l’improvisation collective dans le jazz de la Nouvelle Orléans, « qui va nous faire retrouver tous les caractères précédemment dégagés et qui sont la trame de la mentalité africaine. » (p. 121)

 

le thème

Le thème  doit constamment orienter et diriger les démarches de chaque exécutant, aussi loin que l’entraînent sa technique et son imagination. Mais il faut aussi tenir compte des exécutions voisines, les prévoir et s’y intégrer, y accorder la sienne.

Invention spontanée, imprévisible même pour celui qui la crée, et qui, influencé par le jeu du groupe, abandonnera la voie qu’il s’était tracée. 

Création libre, mais qui n’est jamais indépendante ni gratuite. Tout improvisées qu’elles fussent, les variations n’étaient jamais arbitraires, ni gratuites, et l’interprétation était l’oeuvre de l’orchestre dans son ensemble, dans sa totalité, et non la conjonction d’exécutions individuelles.

L’édification en commun, l’appartenance à la communauté stimulait chaque interprète, et provoquait chez lui comme chez ses partenaires des idées nouvelles, des phrases inattendues qui en amenaient d’autres, augmentant ainsi le sentiment de sa liberté en même temps que sa conscience d’appartenir à la collectivité, sans laquelle il n’était plus rien - exaltant en même temps sa personnalité et son sentiment de participation à l’oeuvre commune. (p. 121)

Les relations d’ordre, de hiérarchie, de structure et leurs rapports au temps se révèlent, comme dans les fondements de la musique africaine, dans une forme souple, mouvante, renouvelée sans cesse, jamais à l’identique. De même le rapport de l’exécution au thème est mis en parallèle au rituel de la possession.

L’esprit, la trame effective, la technique sur lesquels s’établit la musique de la Nouvelle Orléans sont les mêmes que ceux des cultes de possession, et nous pouvons établir une comparaison quasiment terme à terme entre la nature des cérémonies des cultes africains et celle de l’exécution d’un morceau de jazz - entre l’esprit de la communauté religieuse ou de la communauté des assistants à la cérémonie et celui de l’ensemble de l’orchestre ou de la salle tout entière. 

Nous retrouverons entre tous les musiciens une communion totale, la communauté dans la solidarité, le partage des rôles, la disparité, mais aussi la réciprocité et l’équivalence, l’égalité dans la tâche de l’édification commune - et nous verrons l’assistance entrer dans cette communion et la partager.

Et, dans l’élaboration du morceau, de la mélodie, nous verrons réapparaître cette indétermination, cette imprévisibilité du futur et de la continuité au sein de sa nécessité, ainsi que la multiplicité dans l’unicité.

Actualisation d’un moment, d’un état à la fois mental, affectif, et physique, corporel, matériel, la réalisation du morceau, sa concrétisation sonore devient réalité dans le moment où elle se crée, et ne devient réalité que par cette création.  (p. 122)

Le thème, les harmonies constitutives restent les mêmes, la structure est identique, mais la forme, la mélodie sont originales. Les impulsions de l’imagination, les suggestions de la mémoire, l’inspiration, la disposition, l’humeur, les conditions et les influences interfèrent et s’enchaînent, et c’est par leurs apports et leur action que le thème s’enrichira et se développera, que la phrase musicale se concrétisera et que ce qui n’est encore qu’un noeud de potentialités deviendra une réalité.

 

Et le thème lui-même, le générateur de l’exécution, qui n’existe que par lui, n’acquiert d’existence que dans et par cette exécution. De même que dans le rituel de la possession par les Dieux ou dans la fabrication du masque, l’exécution peut modifier le thème, changer sa teinte, certains de ses caractères particuliers ou même sa forme générale. Le thème vit, il évolue, il se transforme, et chacune de ses résurrections lui apporte et lui enlève quelque chose.

Mais en même temps sa structure, son identité profonde subsiste, et sa permanence et son identité assurent celles de l’exécution, à travers tous ses développements et ses avatars.

Ce qui exprime la participation et la complémentarité entre les deux modes d’existence - le potentiel et le réalisé. (p. 123)

A la fois entre le thème et son développement, mais aussi entre les différentes formes successives ou coexistantes de ce développement - et sur le plan mystique entre le monde de l’invisible et celui du visible, entre le monde du sacré et celui du profane, celui de l’incréé et celui du créé.

Le passage de l’un à l’autre nécessite l’application d’une technique. La récréation mythique met en jeu des lignes de forces magiques, le rituel servant à actualiser et à canaliser celles-ci et à les diriger vers l’effet à accomplir.

L’improvisation collective

La technique de l’improvisation collective repose aussi sur l’utilisation de certains courants affectifs qui s’établissent entre les musiciens, et même entre les musiciens et l’auditoire, sur la captation d’influences subtiles, impondérables, parfois fortuites, qui peuvent amener l’exécutant à une sorte d’état second, d’état de transe, auquel certains essayent d’accéder par l’alcool, la drogue, mais le rythme su corps et de la musique, mais le jeu des tambours suffisent à y faire atteindre.

C’est alors que les variations surgiront d’elles-mêmes, que les phrases s’engendreront spontanément, directement issues de leur nécessité interne au moment même où elles jaillissent. » (...)

Ainsi réapparaît la liberté dans la contrainte, la détermination relative du futur, autodétermination procédant par exclusion plus que par implication, l’élimination des possibilités non réalisées restreignant le champ du probable et les obligations contenues dans le passé y façonnant le devenir. » (p. 124)

Ainsi, conditionnée par les seules obligations, les seules contraintes résultant de la nature même de l’improvisation collective, de même que dans les manifestations de la possession par les Dieux, la création reste libre, spontanée, toujours imprévisible puisque l’expression en est informulée avant sa formulation même - puisqu’elle aurait pu et qu’elle pourra toujours se formuler autrement, dans d’autres circonstances et sous d’autres influences.

D’ailleurs ces contraintes, ces limitations, aussi bien que celles résultant des règles du jeu collectif que celles provenant du thème et qu’exprime la section rythmique, sont les conditions mêmes de cette liberté. (p. 125)

la hiérarchie dans l’orchestre

Elle répond dans l’orchestre à ce qu’elle est dans l’organisation des sociétés africaines :

Le meneur de jeu n’est pas nécessairement le chef en titre de la formation, ni même le meilleur trompette. C’est le meilleur musicien, celui qui a le plus de technique, le plus de savoir, et surtout le plus grand dynamisme, le plus d’ascendant. Ce qui ne lui donne pas le droit de briller individuellement, d’écraser ses coéquipiers par son jeu et sa personnalité, mais lui impose d’assumer la charge d’assurer à l’ensemble une cohésion parfaite, et d’enlever ses partenaires au-delà d’eux-mêmes, d’élever au maximum le niveau du groupe et celui de chacun, de faire ressortir les qualités individuelles et de masquer les défaillances.

De la solidarité, de l’entente totale naît la joie de jouer entre copains, entre frères, et de là une sensation d’aisance, d’équilibre et de détente, qui gagne l’auditeur et l’inclut dans le plaisir du jeu. (p. 126)

le rythme et le temps

La section rythmique n’est pas figée dans la répétition du même : elle participe du mouvement interne et du devenir sonore dans une répétition jamais à l’identique.

... si la section rythmique reste en retrait, à l’arrière plan, se contentant de soutenir les cuivres et les anches, la section mélodique qui elle, exprime le thème et le crée, en en développant le contenu - comme les tambours semblaient simplement accompagner les danses des Filles des Dieux, nous savons que ce n’est qu’une apparence.

Ce sont les tambours qui font descendre ces Dieux, dirigent les danses et règlent la cérémonie.

Et c’est de même la section rythmique qui maintient le thème, entretient et crée l’ambiance, et peut-être même la mélodie...

Tapie dans l’ombre, effacée, son rôle est prépondérant, et ici encore se manifeste cette relation inverse entre la préséance et l’efficacité, cet équilibre inversé entre les responsabilités et les honneurs, ou cette notion de compensation, de correspondance réciproque et comutative qui à la fois rétablit l’égalité et l’unité, et, dans la complémentarité des fonctions et des obligations, forge l’ensemble en un tout indissociable. (p. 127)

l’assistance, l’ambiance

L’assistance, point capital, n’est pas un public passif, mais répond activement de ces échanges.

Un autre aspect de cette communication entre tous les participants, non plus seulement l’orchestre, mais également l’assistance, - de cette communion de tous à l’oeuvre commune, où tous sont acteurs, c’est l’ambiance.

L’ambiance est une réalité concrète, palpable, un effet de groupe qui résulte de causes complexes et dont la présence, quand elle s’établit, est indéniable.

C’est que, musique sensorielle, la musique nègre et la musique de jazz, ne sont pas destinées à la délectation intellectuelle. Elles se goûtent par la participation physique, elles se vivent. Le corps absorbe la musique, le rythme et les restitue dans la danse. » (p. 128)

Entre l’estrade et la salle il y a transfert, passage, échange continu, envoûtement réciproque, et, confondue dans le défoulement de toutes les énergies accumulées, fondues en une masse commune, l’assemblée tout entière, participe à la création de la musique, comme ailleurs, en d’autres circonstances, elle eût participé à la recréation du mythe et à la descente des Dieux.

Le jeu a remplacé le rite, mais les mêmes forces affectives sont toujours à l’oeuvre. (p. 129)

Bien qu’il conclue son article en regrettant, après la musique de la Nouvelle-Orléans, « la dénaturation que la musique de jazz dut subir, avant de recevoir droit de cité » (p. 129) ; bien qu’il pose ses questions :

Mais dans quelle mesure (le jazz) exprime-t-il encore l’âme nègre, sa conception de l’homme et du monde - dans quelle mesure enferme-t-il encore une réalité africaine ? Dans quelle mesure même est-il encore lui-même ? ; bien qu’il condamne ces « musiciens noirs des USA » pour avoir,  sous l’emprise insidieuse du milieu blanc (...) sacrifié l’essentiel de leur héritage africain à un fallacieux renouvellement qui n’est, à tout le moins, qu’un reniement. (p. 130)

Pierre Minne nous donne un très beau texte sur l’esprit du jazz, dont la valeur s’étend selon nous au-delà du style Nouvelle-Orleans - qu’il décrit admirablement dans son fonctionnement profond - pour s’appliquer à d’autres temps de l’histoire du jazz, jusqu’au free jazz ou à des formes actuelles, et à ses influences sur certaines « nouvelles musiques improvisées ».

L’insistance avec laquelle Albert AYLER se réfère à la musique de la Nouvelle-Orléans, à sa réjouissante beauté, et ses efforts pour en rajeunir le feeling en témoigne au plus haut degré d’exigence. Nous le retrouverons tout au long de cet ouvrage.

C’est vraiment de la musique libre, spirituelle. Pas seulement de la free music. Et en la jouant, les musiciens s’inquiètentde ce qu’ils jouent. Mais nous nopus écoutons les uns les autres. Bien d’autres ne jouent pas ensemble, alors ils ne produisent que du bruit. Ça crie, c’est de la néo-avant-garde. Mais nous essayons de rajeunir ce vieux feeling de la Nouvelle-Orléans où le musique peut être jouée collectivement et dans des formes libres.

Albert AYLER (1936-1970), sax/cmp, Down Beat novembre 1966, Nat Hentoff, TrA

Douze ans plus tôt, le musicologue français André HODEIR portait son diagnostic esthétique :  

Certes, l’effort des pionniers de la Nouvelle-Orléans en vue de constituer un langage demeure digne de respect. Esthétiquement, leur oeuvre n’en fut pas moins un échec.

André HODEIR, Homme et problèmes du jazz, 1954

Cet article de Pierre Minne, par sa densité et sa puissance d’analyse, apporte les éléments de la composante africaine de l’éthique du jazz, telle que cet essai cherche à la définir.

Nous allons entendre maintenant les jazzmens/woomens de toutes époques et de tous styles s’exprimer sur quelques-uns des thèmes mis en évidence par Pierre Minne dans le jazz des origines :

- la permanence de l’intérêt pour l’Afrique et le ressourcement africain, qui n’a cessé de nourrir les révolutions du jazz.

- l’esprit de groupe, la recherche collective d’un son d’ensemble, appuyée sur les richesses individuelles, les rapports hiérarchiques dans le groupe...

- la relation au public

IndexAYLER Albert (saxophoniste ténor, lead) ; BROWN James (vocal,comp, lead) ; DUBOIS W.E.B. (écrivain, politique, USA, panafricanisme) ; FRANKLIN Aretha (vocal, comp) ; GERBER Alain (écrivain, critique jazz) ; HODEIR André (compositeur, musicologue, écrivain) ; JONES Leroi (critique jazz, écrivain, poète musicien, USA) ; MINNE Pierre (écrivain, ethnomusicologue) ; RUSHING Jimmy (vocal, blues) ; VAUGHAN Sarah (vocal) ; WONDER Stevie (piano, vocal)
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