- jazz; l’art et la « morale »

Voilà donc à présent que la vertu propre du Bien nous est venue se réfugier dans la nature du Beau 

SOCRATE (~470-~399)

 

L’art élève l’homme

PLATON (~428-~348)

 

Le bon n’est que le beau mis en action

Jean-Jacques ROUSSEAU (1712-1778)

 

Deux qualités essentielles à l’artiste : la morale et la perspective

Denis DIDEROT (1713-1784)

 

Ce qui est vraiment beau est ce qui rend l’homme meilleur

Madame de STAËL (1766-1817)

 

La peinture n’est que de la morale construite

STENDHAL (1783-1842)

 

L’art d’à présent ne doit plus chercher seulement le beau mais encore le bien

Victor HUGO (1802-1885)

 

La puérile utopie de l’art pour l’art, en excluant la morale et souvent même la passion, était nécessairement stérile

Charles BAUDELAIRE (1821-1867)

 

Et il ne faut pas dire, comme on en a l’habitude, que les artistes ne font que refléter les sentiments de leur milieu. Ce serait déjà beaucoup (...) Mais ils font davantage. Certes, ils puisent largement au fonds commun amassé par le tradition, mais ils accroissent aussi ce trésor. Ils sont vraiment des inventeurs et des guides.

Auguste RODIN (1840-1917), (Eluard, B .., p. 63)

 

Nous devons être capables aussi de nous tenir au-dessus de la morale : et pas seulement nous tenir avec la rigueur anxieuse de qui craint à tout instant de glisser et de tomber, mais aussi le survoler et jouer au-delà ! Comment alors nous priver de l’art, comment nous priver du fou ! - Et tant que vous avez encore honte de vous-même vous ne serez point des nôtres. (B, , p. 432)

Il est indigne d’un philosophe de déclarer : le bon et le beau ne sont qu’un : si, en plus, il ajoute « le vrai également », il mérite la bastonnade. La vérité est laide : nous avons l’art afin que la vérité ne nous tue pas.

(B, p. 434)

L’art pour l’art* - La lutte contre tout but assigné à l’art est toujours une lutte contre la tendance moralisante dans l’art, contre la subordination de l’art à la morale. L’art pour l’art veut dire « Au diable la morale ! » - Mais cette hostilité même traduit le pouvoir tyrannique du préjugé. Si l’on exclut le but de prêcher une morale et d’amender l’homme, il ne s’ensuit nullement que l’art soit dénué de justification, de but et de sens, bref, soit « l’art pour l’art », ce serpent qui se mort la queue. (...)

Quelque chose à quoi l’instinct de l’artiste n’aurait point de part ? Ne serait-ce plutôt la condition première du pouvoir de l’artiste ?.. Son instinct le plus profond le porte-t-il vers l’art ? Ne le porte-t-il pas plutôt vers le sens de l’art, vers la vie ? Vers un idéal de vie ? L’art est le grand « stimulant » de la vie : comment pourrait-on le concevoir comme dénué de raison d’être et de frivolité, comme « art pour l‘art » ? (...) Le coassement virtuose de grenouilles transies qui désespèrent dans leur mare... Tout le reste , c’est l’amour qui l’a créé... 

Friedrich NIETZSCHE (1844-1900), B, p. 439

 

Les connaisseurs admirent la « patte » (comme on asdmire un danseur de corde) et apprécient la « peinture » (comme on apprécie un pâté).

Les âmes affamées s’en retournent affamées.

La grande foule se promène à travers les salees et trouve les toile « gentilles » ou « formidables ». (...)

c’est cet état de l’art que l’on nomme « l’art pour l’art ».*

Cet étouffement de toute réson,nance intérieure, cette dispersion inutile des forces de l’artiste, voilà « l’art pour l’art ».

L’artiste recherche le salaire de son habileté, de sa puissance inventive et de sa sensibilité sous forme matérielle. Son but deveint de satisfaire son ambition et sa cupidité.

Wassily KANDINSKY (1866-1944), Du spirituel dans l’art...

* L’art pour l’art : L’expression est de Victor COUSIN, en 1818 : « Il faut de la religion pour la religion, de la morale pour la morale, de l’art pour l’art ».

Je hasarderai donc ceci : le rapport qui naît de la négation du réel par le merveilleux est essentiellement de caractère éthique, et le merveilleux est toujours la matérialisation d’un symbole moral en opposition violente avec la morale du monde au milieu duquel il surgit.

La peinture au défi, 1930

Tout homme, tout artiste qui sent en lui la force et la grandeur de la création, qui a de son art l’idée la plus haute, est naturellement intéressé à combattre une conception qui, divisant, morcelant les arts, les réduit au niveau de l’artisanat, les dépouille de leurs visées ambitieuses comme lumière et guide de l’humanité.

Louis ARAGON (1897-1982), cité par Eluard, Anthologie...

 

Encore une fois l’esthétique, par le biais du style, vient au secours de l’éthique et empêche celle-ci de basculer vers la morale (...).

Bertrand RICARD, Rites, code et culture rock,

Un art de vivre communautaire (le style comme éthique), 2000 ? p. 180

 

Ce qui me concerne n’est pas d’avoir toujours raison (right), mais je dois m’efforcer d’être toujours juste (fair). C’est mon credo. L’erreur est humaine. L’attitude fausse, c’est de ne pas rechercher la justice. La vérité, je veux seulement chercher toujours la vérité ! Je suis, exactement, un amoureux de la vérité !

Dizzy GILLESPIE (1917-1993), tp/comp/lead, Down Beat, mai 1972, Mike Lourne, TrA

 

Je voudrais être une force pour une bonté authentique. En d’autres termes, je sais qu’il y a des forces mauvaises, qui apportent de la souffrances aux autres et de la misère au monde, mais je voudrais être une force qui agisse véritablement pour le bien.

John COLTRANE (1926-1967), saxophoniste, Frank Kofsky, 1966, TrA

 

J’ai maintenant conscience d’être un être humain qui réfléchit, non pas seulement sur son métier, sur ses préoccupations musicales, mais sur tout ce qui est capable de donner un sens à notre vie.

Sonny ROLLINS (1930), saxophoniste, JMag 92, mars 1963, Clouzet / Delorme

 

L’essence d’un individu transparaît dans son art : son intégrité, sa compassion, sa compréhension, son désir de mieux-être pour l’humanité. Le jazz s’adresse à l’âme...

Le jazz vous pousse à réfléchir, à vous interroger :  « Comment faire en sorte de vivre mieux, tous ensemble, de construire un monde meilleur ? » Il renferme des vertus nobles, courageuses, et parle à l’être dans toute sa richesse. 

Arthur BLYTHE (1940), saxophoniste, JHot 515, nov. 94, Romain Grosman.

 

... Je recherche l’ « éloquence », l’ « exactitude » et l’ « élégance » - comme d’autres choses telles que la profondeur, le pathos, la joie - mais je ces trois qualités - qui figurent au dos de la pochette de Love Supreme, de John Coltrane, qui ont eu un grand effet sur moi. C’est un art de vivre, une façon d’être. Je ne pense pas qu’on puisse s’efforcer à l’élégance, à l’éloquence et à la pureté dans la musique, et pas dans la vie.

John McLAUGHLIN (1 1942), guitariste, Musician 45, juillet 1982, Robert Fripp, TrA

 

L’important c’est d’ouvrir l’imagination des gens . Ce qui donne un sens à la vie. Qu’ils acceptent une certaine proportion de beauté, et leur vie prendra davantage de sens. Seul un imbécile - ou quelqu’un manquant particulièrement de sagesse - éliminerait la beauté de sa tête.

Donald AYLER (1942), trompettiste, JMag 462 (Valerie Wilmer, 1966)

 

Q : Votre musique s’inscrit-elle dans une conception générale de la destinée du monde et de l’homme ?

R : Je crois bien que ma musique exprime comme une conception générale de la destinée du monde et de l’homme - mais elle reflète plus que ça, plus que le monde et l’homme : toutes les galaxies, planètes, et dimensions, les femmes et les enfants, et mieux encore la vie, qui mêlent politique, philosophie et religion (mais « religion » est synonyme de vie pour moi).

Sabir MATEEN (194 ?), sax., JMag 491, avril 1999

 

Avec le jazz je m’aperçois (par rapport à l’utilisation de la contrebasse dans le classique) que j’ai affaire à plus d’humanité, à plus de fragilité. Cette musique, devenue universelle, représente un état créatif constant, un état de liberté et de révolte ; le risque d’être soi et de chercher. C’est une musique de coeur, d’âme, de questions, où le musicien est responsable.

Joëlle LEANDRE (1951), contrebassiste, JMag 513, mars 2001, Monique Feldstein

 

C’est le sens de notre musique (avec Jarman et Jenkins) : contribuer à la résolution des conflits, conforter en chacun le sentiment que quelque chose d’autre se joue en nous et nous relie à tout ce qui est, à tout ce qui dans le monde oeuvre pour le bien.

Myra MELFORD (1957), pianiste, JMag 508, oct. 2000, Alexandre Pierrepont

IndexARAGON Louis (écrivain) ; AYLER Donald (trumpet) ; BAUDELAIRE Charles (écrivain) ; BLYTHE Arthur (sax alto, comp, lead) ; COLTRANE John (saxophoniste, comp, lead) ; COUSIN Victor ; DIDEROT Denis (philosophe) ; GILLESPIE Dizzy (trumpet, comp, lead) ; HUGO Victor ; KANDINSKY Wassily ; LEANDRE Joëlle (contrebass, vocal, comp, lead) ; MATEEN Sabir ; McLAUGHLIN John (guitariste, comp, lead) ; MELFORD Myra ; NIETZSCHE Friedrich (philosophe) ; PLATON ; RICARD Bertrand (critique rock) ; RODIN Auguste ; ROLLINS Sonny (saxophoniste, comp, lead) ; ROUSSEAU Jean-Jacques ; SOCRATE ; STAËL Madame de ; STENDHAL (écrivain)
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